Murmures

Sunny Side : Les nouveaux projets de Fabrice Puchault chez ARTE France
septembre 2016 | Projets culturels | Cinéma/TV | France
Source : Le blog documentaire

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Nouvelle rencontre effectuée parmi les diffuseurs en parallèle du Sunny Side qui, chaque année, nous permet d’ébaucher un panorama de la production documentaire en France, et dans le monde. Après Caroline Béhar pour France 5, place ici à Fabrice Puchault, qui a récemment quitté la direction de l’unité documentaire de France 2 pour rejoindre l’unité « Société et Culture » d’ARTE France. Entretien.

Le Blog documentaire : Vous avez changé de maison en début d’année ; avez-vous pour autant changé de métier ?

Fabrice Puchault :
Mon métier reste le même. Il s’agit d’essayer d’organiser la rencontre entre des projets, des personnalités, des écritures et un public. Cela induit de repérer dans un flux considérable de propositions LA perle, celle qui aura le plus de valeur pour une antenne et le plus de force pour les téléspectateurs. Cela implique un double mouvement, qui peut sembler parfois contradictoire : tenir fermement à la singularité des objets, et ne cesser de penser au grand nombre, ceux qui regardent la télévision.

Ce qui change en revanche, c’est la chaîne. C’est une nouvelle vision et une nouvelle identité que je dois servir. ARTE reste une affirmation particulière, une « personnalité éditoriale » tout à fait singulière. C’est en quelque sorte une contre-programmation permanente par rapport à l’ensemble de l’offre télévisuelle. Nous ne cherchons pas, bien sûr, à nous inscrire en opposition aux autres, ni à réagir aux programmes de nos concurrents ou partenaires, mais nous travaillons fondamentalement sur des objets audiovisuels différents. En essayant à chaque fois de trouver la meilleure articulation possible entre le tissu créatif (les auteurs, les producteurs, etc.), l’innovation (en termes d’écritures comme de technologies) et les téléspectateurs pensés dans toutes leurs diversités. Nous sommes et nous restons finalement des « match makers ».

Je regarde donc toujours de nombreux films, lis énormément de dossiers… tout en me familiarisant au plus vite avec une nouvelle structure, de nouvelles procédures, de nouvelles contraintes et de nouveaux budgets, en étant au service de la « personnalité » d’ARTE.

Comment fait-on dans ce cas, quand on change de chaîne (de service public) ? On emmène dans sa valise les auteurs et les producteurs avec lesquels on a l’habitude de travailler ?

Non, absolument pas ! Nous exerçons bien sûr un métier fait de relations suivies et construites au fil des années, mais depuis mon arrivée à ARTE, j’ai rencontré 180 producteurs en moins de 3 mois ! Des sociétés bien installées comme des entreprises nouvelles, ou plus jeunes. Rien à voir, donc, avec un carnet d’adresses personnel ! Nous cherchons vraiment à amener des profils très variés pour nourrir la matière des projets d’ARTE. Je travaille donc avec des professionnels que je connais depuis longtemps et avec d’autres que je connais moins, ou pas du tout. Je m’inscris dans une politique d’ouverture vis-à-vis de l’ensemble des acteurs de la filière documentaire, avec un champ d’application très large et des possibilités infinies, en fonction de nos propres contraintes. Toutes les écritures, toutes les singularités, toutes les propositions filmiques sont envisageables, pour peu qu’elles s’inscrivent dans nos critères et notre ligne éditoriale.
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Qu’est-ce que vous annoncez cette année au Sunny Side ? Quelles nouvelles initiatives ? Et quels nouveaux programmes ?

Nous annonçons de beaux films, et des moments importants pour notre antenne. C’est par exemple La Permanence, d’Alice Diop, récemment primé au festival « Cinéma du Réel », ou Hussein Habré, une tragédie tchadienne, de Mahamat-Saleh Haroun, présenté cette année à Cannes.

C’est aussi Les enfants de Baldwin (titre provisoire), réalisé par Raoul Peck à partir d’un livre inachevé de l’écrivain américain James Baldwin dans lequel celui-ci revient sur la disparition de trois de ses amis : Martin Luther King, Malcom X et Medgar Evers. C’est ici un très admirable et très politique travail sur les archives, dans un tissage narratif assez extraordinaire. Cette Histoire des années 60 s’avérera, vous le verrez, terriblement vivante et actuelle. C’est d’aujourd’hui qu’elle nous parle, et c’est cela que nous cherchons : que l’Histoire trouve un sens immédiat, une résonance forte dans notre présent.

Le réalisateur israélien Shimon Dotan nous proposera également une large histoire des colons, de 1964 à nos jours. Nous lancerons aussi une programmation évènementielle autour de Barack Obama avec une série de 4 x 52′, notamment produite par Les Films d’Ici. Que peut la politique, au cœur du bureau ovale ? C’est tout l’enjeu de cette réflexion sur l’exercice du pouvoir.

Nous affichons d’ailleurs l’ambition de multiplier ce type de soirées événementielles, et d’accentuer nos efforts en faveur des séries documentaires. Nous sommes par exemple en coproduction avec PBS pour La guerre du Vietnam, de Ken Burns, qui reviendra sur ce pan d’histoire en 9 x 52′, avec des témoignages tournés dans les deux camps du conflit. La diffusion est prévue en France et aux Etats-Unis en 2017, pour trois mardis consécutifs.

Nous développons également une autre série, de Thomas Balmes sur le premier procès (assez dingue), la première class action contre des fabricants d’armes aux Etats-Unis. C’est vraiment, vous l’aurez compris, un format que nous souhaitons développer, en creusant davantage encore l’histoire contemporaine, plus proche de nous.

Citons également Jérôme Prieur et Patrick Rotman, deux auteurs « classiques » qui reviennent avec un film sur les Jeux Olympiques de 1936 pour le premier, et un documentaire sur les brigades internationales – et la complexité politique du mouvement – pour le second.

Un mot enfin, côté Culture, avec un programme autour de Hugo Pratt, et une formidable série réalisée par Frédéric Bonnaud sur l’histoire du cinéma, avec un épisode assez savoureux sur le sexe. Ce sera diffusé à l’automne.

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