L’engagement des femmes cinéastes

Table-ronde au festival de Cannes 2008

Print Friendly, PDF & Email

Le 21 mai 2008 s’est tenue au Pavillon des Cinémas du Sud du festival de Cannes une table ronde animée par Jean-Pierre Garcia (Festival International du Film d’Amiens) et Jeanne Labrune (réalisatrice), avec Taghreed Elsanhouri (Soudan, réalisatrice), Angie Mills (Afrique du Sud, productrice), Osvalde Lewat (Cameroun, réalisatrice), Lucia Murat (Brésil, réalisatrice), Tan Chui Mui (Malaisie, réalisatrice), Awatif Na’eem (Iraq, actrice), Bani Etemad (Iran, réalisatrice), ayant pour thème : « Cinémas et engagement : un engagement féministe, artistique et /ou politique ? » On en trouvera ici la transcription intégrale.

François Belorgey, ministère des Affaires étrangères : Bonjour. Nous sommes heureux de vous accueillir pour cette seconde table ronde de la semaine, consacrée à l’engagement des femmes cinéastes du Sud. Je tiens à remercier Jean-Pierre Garcia, directeur du Festival d’Amiens, Jeanne Labrune, réalisatrice française, ainsi, bien sûr, que toutes les femmes du Sud qui ont accepté de participer à cette table ronde et à ce programme du Pavillon des Cinémas du Sud. Cette table ronde est consacrée au Cinéma et à l’engagement, qu’il soit politique, artistique ou féministe. Nous allons donc parler de l’engagement dans son sens le plus large. Nous avons l’honneur d’avoir avec nous Taghreed Elsanhouri, jeune réalisatrice soudanaise qui travaille à la fois à Khartoum et à Londres. Elle est surtout documentariste. Nous avons aussi parmi nous Angie Mills, productrice sud-africaine engagée dans ce cinéma très dynamique et très présent sur le continent à l’heure actuelle. Nous accueillons également Osvalde Lewat, réalisatrice camerounaise dont le film Une affaire de Nègres (Black Business en anglais), très intéressant, passe en ce moment. Lucia Murat, réalisatrice brésilienne qu’il est peut-être inutile de présenter tant elle est connue. Tan Chui Mui, jeune réalisatrice malaisienne dont le parcours est aussi intéressant. Enfin, la grande réalisatrice iranienne Rakhsan Bani Etemad, que je souhaite remercier vivement d’avoir accepté cette invitation.
Jean-Pierre Garcia : Bonjour. Rassurez-vous : les paroles d’hommes ne vont pas durer longtemps ! Nous allons très vite passer aux « paroles de femmes », si vous me permettez l’expression. Quand François Belorgey et les collègues du ministère français des Affaires étrangères ont souhaité organiser un tel débat, je me suis d’abord dit : « Parler ainsi d’engagement, ça date un peu ! » Mais je me disais qu’en même temps, cela renvoyait à tant de mouvements, tant de paroles et d’expressions de vie que nous avons rencontrées ici et là… Nous les rencontrons tous les jours lorsque nous préparons ces rencontres et ces festivals afin de multiplier ces relations entre public, cinémas et cinéastes du monde entier. Je me suis donc dit : « Pourquoi pas ! » Après tout, il y a tellement de regards et d’approches possibles, d’approches particulières selon des situations particulières, propres à chacun de ces pays et de ces cinéastes, que ça vaut probablement la peine de travailler dessus de façon approfondie.
Jeanne Labrune, scénariste, productrice et réalisatrice, s’est toujours engagée profondément dans la vie mais aussi dans le monde du cinéma en France, à travers toutes ses activités dites professionnelles. Nous avons donc pensé que, du côté des gens de cinéma qui vous accueillent ici, il serait juste et fort bon de donner en premier la parole à Jeanne Labrune. Après l’introduction qu’elle fera, chacune des cinéastes évoquera son itinéraire.
Jeanne Labrune : Merci. Je voulais vous dire que j’étais surtout là par curiosité : il m’intéressait beaucoup d’entendre la parole de réalisatrices d’autres pays, de connaître les itinéraires des unes et des autres, même si je connais déjà le parcours de certaines. Je vais également résumer mon parcours personnel, car Jean-Pierre a précisé qu’il s’agissait de se présenter. Je suis née en 1950, j’ai fait des études de Lettres et de Philosophie. À vingt-quatre ans, j’ai commencé à faire des longs-métrages. J’ai aujourd’hui 58 ans, je fais donc des films depuis déjà fort longtemps. J’ai à mon actif une douzaine de longs-métrages, ainsi que des documentaires. Je suis auteur et réalisatrice de mes films. J’ai également produit mes derniers films.
Durant la première partie de mon existence, j’ai éprouvé la dureté que signifiait écrire et avoir un désir artistique, le faire traverser une société avec des contraintes économiques. Dans les années 1970, j’ai milité au sein de mouvements féministes « durs » (rires). Dans le même temps, ce qui compte dans ma démarche de réalisatrice est de travailler et d’écrire en oubliant, du moins en France, la question du militantisme féministe. Certaines d’entre vous auront peut-être des remarques à ce sujet. À mon sens, passée la période « nécessaire » du militantisme féministe, c’est-à-dire ce moment où l’on casse les barrières, il y a une longue réflexion à mener. En effet, il y a une forme de féminisme en France (et à mon avis, ce n’est pas partout pareil) qui peut se révéler être un faux militantisme. Pour moi, l’important aujourd’hui est de faire des films, d’écrire des films ; éventuellement de les produire, de traverser les milieux économiques, d’avoir une réflexion politique au sens large et, en tout premier lieu, une réflexion artistique.
Jean-Pierre Garcia : Tout de suite, donc, Lucia Murat, réalisatrice brésilienne. Lucia, pourrais-tu nous présenter ton parcours ? Il est assez exceptionnel, depuis ton engagement du début jusqu’à la période la plus récente.
Lucia Murat : Merci pour cette invitation ! Je suis une représentante de la génération 68 au Brésil. Elle est un peu différente de celle qui existe en France. À cette époque, le Brésil était une dictature. À la fin de l’année 1968 eut lieu un coup d’Etat. La génération du mouvement d’alors, dont je faisais partie, était allée jusqu’à s’armer contre la dictature. Je suis restée environ trois ans dans la clandestinité. Ensuite, je suis allée en prison où j’ai été torturée. Ce fut une expérience si terrible que j’avais du mal à en parler à l’époque. Lorsque je suis sortie de prison, j’ai eu beaucoup de mal à reprendre le cours de ma vie. J’ai réussi à travailler comme journaliste sous la dictature qui existait encore. Elle était affaiblie mais beaucoup de choses nous étaient interdites. J’ai rencontré des gens qui faisaient du cinéma et du documentaire comparables à une démarche journalistique. En 1978, les Sandinistes ont envahi le Nicaragua. Le Palais national du Nicaragua fut assiégé. J’ai alors voulu m’y rendre pour y tourner un documentaire. Ce fut mon premier film. Je voulais récupérer ma génération perdue et ma vie avant tout cela. Le cinéma est ainsi entré dans ma vie comme quelque chose de très urgent. Il était lié à l’expérience que je vivais et à ce dont j’étais témoin. Il a peut-être été pour moi une façon de survivre à tout cela. Tous mes films ont ensuite parlé de situations qui se rapprochaient de ma propre histoire. Mon cinéma est également lié de façon étroite à l’histoire politique du Brésil, qu’il serait trop long de raconter. L’important pour moi, comme madame l’a dit, n’est pas que le cinéma porte des projets politiques. Il me semble que l’engagement dans l’art en général (et dans le cinéma en particulier) doit venir de notre cœur, il doit refléter notre réalité et notre vérité. Voilà, merci !
Jean-Pierre Garcia : Merci, Lucia. Taghreed, réalisatrice soudanaise, a passé une grande partie de sa vie au Royaume-Uni. Elle se définit comme une réalisatrice des deux pays. Peux-tu nous parler de ton cinéma, de ton histoire et de ton vécu en exil ? Qu’est-ce que cela a apporté à ton parcours de cinéaste ? Comment se sont déroulées les retrouvailles avec ton pays, le Soudan ?
Taghreed Elsanhouri : Thank you. I’m sorry to speak in English! I love the word exile, I wish I could claim it but I moved to England as a child, so it’s my parents’ exile. I’m the legacy of it. I began by working in television. I was very fortunate that there was an Arabic channel. I wanted to be in television but it was very difficult to get into this industry in England. There was an Arabic channel called MBC and I had an opportunity to work for it. I guess that’s where I began to get production skills because I didn’t study film. For a long time, I wanted to say something about Sudan but nothing was coming to me. There was nothing that I could express until the Darfur crisis broke out in 2005. Then, I felt very passionately that I wanted to be in Sudan and understand what was going on. I think part of that impulse was due to the fact that I was hearing in the news that Arabs killed Africans. I knew there was a kind of untruth in that; I didn’t know what it was but I knew that that was not authentic. So, that was the basic impulse. I went to Sudan and made my first independent film, called All About Darfur. I really think that the heart of who I am and why I want to say something is this experience of having come from Sudan at a very young age, being taken to England by my parents and not understanding why they made that choice. There was a sort of displacement in that move. Going to school in England in the 1980’s, I think that all the images I had of myself were through other people’s eyes. They were always a little bit unauthentic. I remembered one experience yesterday, just after a conversation: I was reading Othello at school; we worked on it for like two weeks. I liked him; I thought he was a person like me, he was a Moor. He had what I interpreted as an Arabic heritage, he was African. I was falling in love with Othello! Then our teacher decided it would be great for us to watch Lawrence Olivier’s play Othello. She brought the video of that adaptation. Lawrence Olivier was painted in black shoe polish, and the Othello he played was so repulsive that I burst into tears. I had to leave the classroom because this Othello was pathetic, emotional and superstitious. It was not the Othello I had begun to form in my head as I read Shakespeare’s Othello. At that moment, I think the desire to say something by writing films comes from that one experience.
Jean-Pierre Garcia : Thank you for such an intimate and strong explanation. Merci. Après cette émotion, Angie Mills, d’Afrique du Sud !
Angie Mills : Yes. I’m coming here from South Africa. I’ll start with my beginnings. My mother is from Zimbabwe and her father was from South Africa. He was an English South African. My grandmother was a Ndebele from Zimbabwe. My biological father is from Portugal and my stepfather is a diplomat from Finland (laughter). I’ll start by giving you an idea how stories brought my identity into being. I think it started with literature. We used to travel all over the world, and reading stories became a way of finding friends, I suppose. A child often connects to people in novels. Stories allowed me to make sense of my life. I also think we lived in incredible countries: we went to Nigeria, Denmark… The differences were very extreme. These were great places, but we were really disconnected from friends. So, we had a different tradition of geography as a place to belong, a religion or a specific culture. I think it led me later on as a filmmaker to get interested in stories about people who are rather situated by the complexity of post-colonial life (if you want to call it that way), or post-modern life… These are all political terms, I know. But I think that to me, the search for origins is particularly important at a certain point. That’s why I went to South Africa; that was thirteen years ago. It was in South Africa that I was completely taken by the social project of the country, of liberation, of its possibilities. I think that certain things haven’t gone the way they had been necessarily anticipated. There’s been a complete pleasure in working in South Africa. I also work for a broadcaster’s commissioning editor. As a filmmaker, what is critical in every intervention you’re making is that whether you’re working in the industry as a kind of support person or as a person who’s making work, you are in fact shaping a way forward. That sense of being part of history is a transformation; it’s very profound and very important to me. It’s very difficult for me to imagine this point of my life going somewhere I would have to fit into a specific market or specific kinds of stories. Indeed, here in South Africa, there is still the space in which to fight and encounter, not only in stories but also to find yourself in an interesting way. It’s a country of extremes, I think everybody knows. If you read the press, you know what’s been happening there over the past few days. You really have to kind of live forcing yourself towards a certain centeredness, because you don’t have the security you might have in Western conditions.
So that’s a bit of a long way to where I am now, I’ll just talk a little bit about my current work. It’s a feature-length documentary about a South African jazz singer who went to exile in 1963. She’s the wife of Abdullah Ibrahim but her story is about how they met music in the domestic sphere, and how jazz is one way of looking at improvising one’s life, rather than looking at religion or tradition. Such a music brings and comes from your own influences, so that’s what I do as a filmmaker.
As a commissioning editor at the South-African Broadcasting Corporation, I try to help get people work on things that I find politically interesting. We certainly don’t have enough of an encouragement of women’s work. Unfortunately, in South Africa, feminism as a movement is very thin for many reasons, which I won’t get into here. But this is why we’re still cultivating in a fairly patriarchal society. Thank you!
Osvalde Lewat, réalisatrice et productrice du Cameroun : Après toutes ces femmes aux parcours si riches et si forts, je vais me sentir un peu embarrassée ! En effet, je viens du Cameroun, et depuis que je suis née, en 1976, l’histoire de mon pays est peut-être moins troublée que celle des vôtres. J’ai commencé ma carrière professionnelle en tant que journaliste et je m’intéressais aux sujets culturels et sociaux. Très rapidement, je me suis rendue compte que j’étais frustrée, car après avoir passé des semaines, des mois sur un sujet important, celui-ci était dépassé dès le lendemain de la parution. C’est cela qui m’a donné envie de faire des films, et d’abord des documentaires. J’aurais du mal à me définir comme réalisatrice engagée, je me suis d’ailleurs sentie un peu gênée par l’intitulé du débat d’aujourd’hui, « Réalisatrices et engagement ». En effet, lorsque je me lève le matin, je ne me dis pas : « Quel est le prochain sujet engagé que je vais traiter ? » Je suis plutôt une personne instinctive qui, très naturellement, a été portée vers des sujets liés à la justice, aux préjugés mais aussi aux personnes qui se situent dans la marge. J’ai fait un tout petit film documentaire au Canada sur les Amérindiens, pour le compte de la télévision canadienne. Ce peuple se bat pour changer un peu son image dans la société, qui voit ces gens comme une majorité de sans-emploi plutôt portés sur l’alcool. Ensuite, j’ai réalisé au Cameroun un film sur un prisonnier qui avait été condamné à quatre ans d’emprisonnement puis oublié pendant trente-trois ans. J’ai poursuivi très naturellement dans cette voie. Je suis allée vivre au Congo pendant trois ans, à Kinshasa. Contrairement à ce que je pensais, les femmes avaient très peu de droits là-bas. Pour moi qui viens du Cameroun, où il faut dire que la société est tout de même assez occidentalisée par rapport à certains autres pays d’Afrique, cela fut un véritable choc culturel, même si je suis africaine. Je me suis également rendue compte qu’à l’est du pays, il y avait toujours de la violence et une guerre dont on ne parlait pas. J’ai donc fait un film sur les femmes violentées à l’est du Congo, qui s’intitule Un amour pendant la guerre. Je signale au passage que cette guerre a fait plus de quatre millions de morts, et on en parle très peu. Mon dernier film, Une affaire de Nègres, raconte l’histoire d’une unité spéciale au Cameroun qui a enlevé des personnes afin de les interroger, et celles-ci ne sont jamais revenues.
Lorsqu’on voit mon parcours et les sujets sur lesquels je me suis penchée, on peut parler d’engagement car il faut bien des étiquettes, mais je suis plutôt quelqu’un d’instinctif et de tripal. Aussi, en tant qu’Africaine, je pensais qu’il était important que les Africains s’emparent de leurs propres histoires. On a l’habitude de voir à la télévision des documentaires sur l’Afrique qui montrent un continent de misère. On m’a souvent reproché de faire des films qui s’inscrivaient dans cette veine, car il est vrai qu’il ne s’agissait pas vraiment de comédies et ils montraient une Afrique très dure. Néanmoins, je pense que le fait que ce soit moi, une Africaine, qui ai ce regard est le signe que lorsque nous aurons décidé de nous emparer de nos propres histoires, nous pourrons changer nos pays et peut-être l’image que nous donnons à l’extérieur. C’est peut-être en cela que consiste mon engagement. Je le vis plus comme cela : je suis une Africaine militante, mais une militante de l’intérieur. À l’issue des projections, les gens me disent souvent : « Ne pensez-vous pas que si l’Europe s’impliquait bien plus, les choses changeraient ? » Je leur réponds que non, car ma logique est de me battre en Afrique afin que les Africains changent leurs propres pays. J’ai vécu au Congo, j’ai vécu au Cameroun, et la prévarication, la corruption que j’y ai constatées étaient l’œuvre d’Africains. C’est donc peut-être en cela que je suis quelqu’un d’engagé.
Jean-Pierre Garcia : Merci, Osvalde. RakhshanBani Etemad est une réalisatrice qui nous vient d’Iran. Pouvez-vous nous présenter votre parcours, votre histoire, votre relation au Cinéma dans votre pays, l’Iran ?
Rakhshan Bani Etemad : (traduction progressive du persan) J’ai commencé à apprendre le cinéma il y a trente ans. Vers la fin de mes études de cinéma eut lieu une grande révolution dans mon pays. À cette époque, faire des documentaires dans mon pays était quelque chose d’établi. Le cinéma d’alors signifiait un engagement social de la part du réalisateur. Le cinéma n’était pas simplement au service de l’art : il portait son regard sur les problèmes sociaux et visait à interpeller les gens. J’étais à l’époque une jeune fille confrontée à tous les problèmes de la révolution. Pour nous, il fallait avant tout renverser la dictature : les problèmes des femmes venaient bien après. C’est la raison pour laquelle je n’ai jamais voulu m’inscrire ensuite dans un cadre strictement féministe. En effet, je pensais que dans un pays qui souffrait déjà de nombreuses injustices, il fallait instaurer une démocratie avant de songer aux problèmes des femmes. Je pense toujours cela. Notre société a toujours beaucoup de problèmes. Le cinéma me semble être l’instrument de communication le plus fort. Il est d’abord un engagement, un lien entre le cinéaste et son public. Il peut ensuite éventuellement tisser des liens avec d’autres publics du monde.
Jean-Pierre Garcia : Ta Chui Mui est réalisatrice, elle vient de Malaisie. Could you explain your situation and your relationship to cinema?
Ta Chui Mui : Yes. Malaysia is a young country. First of all, it is a Muslim country and they always try their very best to protect women. A few years ago, they suggested that only ugly women be employed by the government, because pretty women could always get employed anyway! (laughter) Two years ago, they wanted to pass a law that allows you to divorce your wife by SMS, but it was not passed! (laughter) I didn’t read the news myself, but two weeks ago, a young woman was arrested for drug trafficking, so they suggested to pass a law under which women who want to travel abroad need their employer’s or husband’s authorization. I hope they won’t discuss it anymore. So, it’s quite a wonderful country! There’s no natural disaster, there’s is petrol, they have money that they don’t spend on us. Half of us are not Muslim. 30% of us are Chinese like myself and we’re not considered as Malaysians. It would appear awkward or strange, but what is also strange is when a foreign person asks me about my nationality: I’m neither Malaysian nor Chinese. I’m just Malaysian-Chinese; that’s very strange about us. There are strong racial bonds. Race is the first thing we need to know about someone. That’s also the first thing you read in the news about someone who died of an accident. I don’t really have problems being a woman, but I have problems being a Chinese in Malaysia: our minority is repressed by the government. It’s a very strange situation.
Otherwise, it’s very easy to live in Malaysia; there’s no war, there’s no natural disaster, your life can be quite comfortable. But on the other hand, politics are strange. Our politicians are not really competent but they try their best! (laughter)
I was born only in 1978, so I’m more aware of the post-feminism period. It’s something I care about too. At the beginning, I had problems with people calling me a feminist; I guess it’s like someone calling me a Malaysian! (laughter) It’s just a label.
Jean-Pierre Garcia : Thank you! Merci. Nous nous trouvons donc à présent devant une situation complexe. En effet, le profil de certaines réalisatrices montre qu’il y a un engagement sur le réel et la société, développé dans un sens ou dans un autre. Ces femmes sont cinéastes, mais le qualificatif de féministe est discutable et discuté : certaines disent être cinéastes avant même d’être femmes. Cela s’inscrit dans la continuité des échanges que nous avons eus lors de la préparation de cette table ronde. Avant d’entrer dans cette problématique de l’engagement, j’aimerais que chacune précise son idée de la « cinéaste femme » : cinéaste d’abord, cinéaste et femme, femme et cinéaste… Par ces questions, je souhaite provoquer le débat. Je vois Osvalde s’emparer du micro ! Vas-y !
Osvalde Lewat : Je voulais te retourner une question, Jean-Pierre : es-ce que tu dis « cinéaste homme » ? (rires)
Jean-Pierre Garcia : Très bonne remarque ! D’accord. Ce qui est important, c’est que tu poursuives le débat dans ce sens ! (rires)
Osvalde Lewat : Ma question est en quelque sorte une réponse à la tienne. Si on ne dit pas « cinéaste homme », dire « cinéaste femme » est pour moi une expression complètement réductrice. Surtout de nos jours, on ne peut réduire quelqu’un à son genre. Si je suis mannequin, on dira peut-être « un mannequin femme », mais en termes de cinéma et de réalisation, je trouve tout à fait dépassé aujourd’hui d’associer ces deux dénominations. A-t-on une façon différente de filmer lorsqu’on est une femme ? Je n’en suis pas sûre. Je pense que nous avons tous un regard différent, et cela est valable pour deux hommes qui traiteraient le même sujet. D’un cinéaste à l’autre, le regard est forcément différent !
Lucia Murat : Ce que tu as dit me semble très bien. Nous faisons toutes les deux partie d’une génération qui a vécu des mouvements féministes très forts, notamment dans les années 1970 où les mouvements militants de femmes étaient très importants. Cependant, je crois que l’art et le militantisme sont deux choses différentes. Je préfère parler de cinéma d’auteur : il est différent, car son auteur est différent. On peut être femme, homme, gay… Chaque expérience est différente, et cela peut se voir dans chaque œuvre. Le cinéma peut aussi être quelque chose de beaucoup plus industriel : j’ai déjà travaillé de cette façon pour la télévision et je n’étais qu’un pion, un maillon de la chaîne. Mon expérience personnelle en tant que femme, en tant qu’ex-prisonnière politique ne transparaissait pas dans mon travail. En revanche, lorsque je fais un film qui me permet plus de liberté, où je parle davantage de moi, de ma vie et de ce qui m’importe, mon regard sera différent de celui d’autres femmes. Dans les années 1990, le cinéma du Brésil était différent : environ 20% des films étaient réalisés par des femmes. On peut dire que ce cinéma fait par des femmes porte généralement un regard plus subversif. Cela s’explique peut-être par l’absence de femmes au pouvoir. Nous avions moins de règles, nous n’étions pas dans l’histoire et nous ne faisions pas partie du cinéma, sauf peut-être les actrices.
Je crois que la vraie différence est dans le cinéma d’auteur, où une personne peut parler de son expérience de la vie.
Ta Chui Mui : I guess that in the beginning, I was always disturbed by the idea of ‘woman filmmaker’, just like when people call me a Malaysian filmmaker. I think in the future, I’ll still be offended by people calling me a Malaysian filmmaker. Why should there be ‘filmmakers from the South’? We are not a sub-country… We should argue about that! I agree on the fact that there is dominance.
Jeanne Labrune : Je m’apprête à dire des horreurs ! (rires) Il y a trente ans, en France, nous coupions la première tête de l’hydre. En effet, très peu de femmes étaient en mesure de faire du cinéma. Il y avait environ 3 à 4% de femmes cinéastes. Aujourd’hui, il faut couper la septième ou huitième tête de l’hydre, donc celle de Jean-Pierre ! (rires) Nous en sommes en effet à un moment où être une femme et cinéaste devient un sujet de conversation dans un festival… En réalité, on n’en a rien à faire, mais pourquoi pas : c’est une manière de se rencontrer. Je trouve que tout cela est assez pervers, du moins en Europe. On se rend compte qu’a priori, il y est tout à fait possible pour une femme de réaliser des films. Pour autant, nous n’en sommes pas encore à une égalité en nombre. Par ailleurs, lorsqu’il s’agit de projets dont le budget est extrêmement lourd, la difficulté est d’autant plus grande. J’ai vécu cela avec un film dont le budget s’élevait à l’époque à environ dix millions d’euros. Cela fut impossible, et le projet a été confié à un réalisateur pour trente millions d’euros.
Aujourd’hui, les lourds budgets cinématographiques sont difficilement confiés à une femme réalisatrice. Il faut donc se méfier quand même. Dans ma génération, très peu de femmes européennes ont pu faire du cinéma. Nous avons dû interdire aux hommes l’accès au festival du film de Créteil, réservé aux femmes. Nous ne voulions pas les bannir, seulement qu’ils comprennent ce qu’était l’interdiction. Nous n’avions pas de comptes personnels à régler avec eux, nous voulions qu’ils puissent se mettre à notre place. Aujourd’hui, les choses ont considérablement changé pour ce qui est des budgets, je suis en effet venue plusieurs fois à Cannes pour mes films. Néanmoins, dès qu’il est question de sujets impliquant des budgets lourds, cela reste très compliqué, même en France. J’ignore s’il est bien de faire des films de vingt ou trente millions d’euros, c’est une vraie question. Mais lorsque cela arrive, c’est très compliqué de le confier à une femme.
Rakhshan Bani Etemad : (traduction progressive du persan) Je me souviens que lorsque je faisais mon premier film, le producteur voulait absolument que j’aie un homme à mes côtés pour me conseiller. Il m’a fallu beaucoup de temps pour le convaincre que je n’avais pas besoin d’un conseil masculin. Il pensait qu’en tant que femme, les gens de l’équipe ne m’écouteraient pas et que, par conséquent, le film ne pourrait pas se faire. Plusieurs personnes pensaient que ce film ne pourrait jamais être achevé. De nos jours, faire des films au sein d’une société très traditionnelle est assez différent. Il me semble que le problème est davantage culturel : comme l’ont dit les autres invitées, lorsqu’une femme souhaite faire un film de qualité et avec un budget conséquent, ça ne passe pas.
Certes, ces problèmes existent, mais je ne crois pas à la spécificité d’un « regard féminin ». Je pense qu’un regard se construit par notre connaissance et notre expérience du monde, ce qu’on a dans la tête et dans le coeur. De mon point de vue, les réalisatrices du monde entier ont peut-être un regard différent, plus minutieux sur les choses, mais je ne crois pas en la spécificité de ce que vous appelez le « regard féminin ». J’espère vraiment qu’un jour, il n’y aura plus de festivals réservés aux femmes, avec cette idée de « regard » particulier. Il n’y en a pas pour les hommes !
Angie Mills : I think I can separate myself from the society that I live in. To talk about myself as a filmmaker is one thing. One can differentially gain access to funds or to means of production. It depends; you can get money because you don’t want to rock the boat. You can try to say that you want to make films that are feminist in nature and that will rock the boat: that might help your access to funding. For me, the issue of a kind of feminist film-making has to do with both men and women. This is about everybody’s work, the society’s work. For example, if you recognize that in South Africa, there are high levels of violence against women, of rape, of abuse, women get attacked because of what they wear or whatever, you can’t ignore these issues! For me, intrinsically, as an activist as well, I cannot pretend, because I have certain privileges, that this is something that is not important. Through these issues, filmmakers (both men and women) can achieve much more complex characterizations. If you watch films dealing with such issues related to what women have to bear (the « Mama Africa », who is the nurturer, who has to carry the nation, patriarchy, tradition…), it’s still a question. Because this is not my experience, this not the experience of my peers; we have a much more complicated relationship than that to our lives, to our world. Similarly, we know this from the Western discourse, when you see films that are made by men who are not feminists. So, you’ve got two levels. One is a level of access: in South Africa, very few women get access to the means of production and funds. Second is the level of representation. Having said that, you also have women who participate in those kinds of representations. They in fact are inscribing in those kinds of hegemonic representations, and that needs to be challenged as well. The Iranian filmmaker was talking about a more sensitive view, but I think this actually has to come with looking at the complexities of people. We have to have the guts to deal with what is not equitable in a society. I can have my hair done and wear a little skirt and get funds, but this is not going to benefit other woman filmmakers and for me, this kind of solidarity is very important. (Applause)
Jeanne Labrune : Comme la personne qui est à ma droite, j’ai longtemps pensé qu’il n’y avait pas de regard féminin ou masculin. Je le pense encore aujourd’hui : il me semble qu’il y a une pensée universelle, qu’elle touche au politique et construit des œuvres artistiques absolument indépendantes du genre. Néanmoins, je pense que de nombreux cinémas d’aujourd’hui sont marqués par le genre, c’est-à-dire, en l’occurrence, par l’aliénation. Un cinéma aliéné, à mes yeux, porte la marque de son sexe. Le jour où on regardera un film sans pouvoir dire s’il est fait par un homme ou une femme (et cela existe, Dieu merci), on sera vraiment dans le cinéma, la pensée, l’art. Cependant, hier soir, je suis allée voir le film de Clint Eastwood et, malheureusement, je me suis rendue compte que l’aliénation était également répartie. En effet, j’ai trouvé ce film épouvantable et que pire bêtise était difficile à imaginer. (rires) Il est vrai que Clint Eastwood est un cinéaste unanimement applaudi, ce qui ne m’a pas empêchée de trouver son film d’une grande stupidité « masculine » dans sa façon de filmer l’actrice, d’exprimer le regard sur un fait divers, de chercher à nous faire pleurer sans y parvenir tant les émotions sont à côté de la plaque… Jusqu’à hier soir, je pensais que le cinéma était libre, qu’il s’affranchissait des sexes mais cette certitude s’est effondrée hier soir. Ce film m’a consternée.
J’ai donc eu la confirmation que l’aliénation est également répartie entre les hommes et les femmes. Par conséquent, je vais devoir moi-même être vigilante car je constate que même à 70 ans, on n’est pas à l’abri de la bêtise ! (rires)
Lucia Murat : Il est difficile pour un homme de parler d’une femme. Je crois aussi qu’on ne peut pas évoquer la question du genre sans connaître la réalité du pays où vit la femme qu’on filme. On ne parlera pas d’une femme au Brésil comme on parlera d’une femme en Iran, en France ou en Afrique du Sud, et particulièrement au cinéma. Au Brésil, le cinéma connaît aujourd’hui une situation économique qui reflète un apartheid social. Les multiplexes, qui ont des milliers de salles dans notre pays qui compte 200 millions d’habitants, sont très chers. Seules les classes privilégiées peuvent les fréquenter. Nous avons aussi un cinéma pirate qui est la conséquence de cet apartheid social. L’impératif est de faire des films pour ces classes privilégiées. J’ai réalisé une comédie musicale adaptée de Roméo et Juliette qui se passe dans une favela de Rio et que j’ai d’ailleurs montrée ici même. Je me rappelle que lorsque j’ai présenté cette œuvre dans une très riche université de Sao Paulo, un jeune homme m’a demandé pourquoi je faisais ce film avec des gamins d’une favela qui dansent le hip-hop alors qu’ils n’ont pas d’argent pour aller au cinéma. C’est cela qui est triste : on voit souvent le cinéma comme un produit pour ce marché-là. Je crois que c’est actuellement notre grand problème, plutôt que des problèmes de personnes.
Taghreed Elsanhouri : I think I never experienced being a woman filmmaker or a woman trying to make films as a handicap. For me, race and colour have been a greater kind of obstacle. But as a viewer, I think from what I see around the world, what is being consumed around the world, what concerns me is the lack of diversity in what we get to see. Most countries have access to the channels that are basically Western-based channels. They’re transmitted to the whole world, and from my point of view it’s a more pressing issue that we’re not seeing the world through diverse voices. There is a lack of plurality, which I think is an urgent matter.
Jean-Pierre Garcia : Nous sommes à peu près aux deux tiers de notre temps de parole. Il y a parmi nous dans la salle un certain nombre de cinéastes. Peut-être pourrait-on leur passer la parole ?
Nadia Elfani : Bonjour. Je suis une réalisatrice tunisienne. Je vis depuis quelque temps en France, donc on me dit parfois franco-tunisienne. Je fais toujours mes films en Tunisie. Je pensais que nous parlerions davantage de l’engagement que de la question des femmes, car il y a déjà eu hier un débat sur ce sujet. J’ai toujours trouvé que les femmes n’étaient pas un sujet en tant que tel, mais il est vrai qu’en tant que femmes, nous rencontrons des difficultés dans la vie quotidienne. Il me semble que nous avons tellement appris à nous battre contre elles que lorsque nous devenons cinéastes, on a tendance à dire que non, nous n’avons pas eu plus de difficultés qu’un homme à faire tel film. Pourtant, ces difficultés sont une réalité, mais comme nous sommes habituées à lutter au quotidien, on fait comme si tout cela était très naturel.
En ce qui concerne mon expérience en Tunisie et l’engagement féministe, il faut dire que la Tunisie est le seul pays musulman où la femme jouit de droits assez exceptionnels : il n’y a pas de polygamie, elles peuvent divorcer et travaillent depuis longtemps dans tous les corps de métiers. C’est pourquoi je suis un peu attristée lorsque vous me dites qu’en tant qu’Iranienne, vous pensez que la cause des femmes passe après la démocratie. Je pense que la cause des femmes est un élément essentiel, nécessaire et obligatoire de la lutte pour la démocratie. Il s’agit quand même de la moitié de la population !
En tant que femme cinéaste engagée, je pense d’abord être femme et je n’y peux rien ! C’est ainsi. Je suis cinéaste par choix. J’ai toujours cherché à faire des films engagés dans le sens où j’ai toujours voulu que mes personnages féminins soient affranchis de tout ce qu’on raconte ici sur l’emprise de la société, le poids de la tradition et de la culpabilité en tant que mère. Car en effet, lorsqu’on est mère et cinéaste, c’est encore plus difficile. Par ailleurs, je voulais aussi évidemment porter un combat politique. Le témoignage que je voulais apporter est qu’aujourd’hui, dans le monde arabe, il y a de plus en plus de femmes qui font des films. C’est très étrange car elles réalisent surtout des documentaires souvent engagés politiquement. Dans ces pays qu’on dit totalitaires, dépourvus de libertés et de démocratie, c’est comme si les femmes avaient pris en main la chose politique. Comme quoi, les femmes vont bien mener la lutte ! Voilà, merci. (Applaudissements)
Jean-Pierre Garcia : Bravo. Alors, aluta continua, comme diraient de nombreuses personnes de ma génération soixante-huitarde ! (rires) Qui sollicite et prend la parole ? Ingrid ! Ingrid Sinclair est une réalisatrice du Zimbabwe.
Ingrid Sinclair : I don’t really want to talk about the struggle of women in cinema and their engagement, even though I make films on women issues. I also make films which are not about women. For example, recently, I made a very short film which I love very much. It deals with a man who has to leave his child while they’re in danger because of soldiers, due to the political situation. He’s a dancer; he arrives at the rehearsal space. Then, he’s held up by terrible violence in the city he has to travel through. His dance is influenced by all this violence.
So for me, a cinema of engagement is not only a cinema that is made by women on women issues. It looks at injustice, not just in our own countries but in the world which we see from the perspective of our countries. In my films, I try to expand the meaning of that injustice, anywhere it happens. It’s not just about some people in Zimbabwe, in Britain or wherever. I want to see films which translate engagement and injustice more widely than just the place where they happen. That can be done through animation, not only through documentaries or dramatized versions of what actually happens. I want to see it as widely as possible. Historically, it is that wide; that’s what I seek to do in my films.
Yamina Bachir-Chouikh : Je suis un peu prise de court. J’avais tellement de choses à dire que Nadia a dites et je ne sais pas vraiment quoi rajouter ! Nous faisons des films surtout par nécessité. Il est vrai que c’est un engagement, une manière de nous battre par l’image. Je fais des films par engagement.
Si on fait seulement des films par engagement, on ne fera pas beaucoup de choses par ailleurs. On essaie donc de faire bouger les choses, lorsqu’on a la chance de faire un long-métrage, un documentaire ou même dans la vie de tous les jours.
Peut-être prendrai-je la parole un peu plus tard. Je m’excuse, je suis très émue de voir autant d’amies dans cette salle !
Osvalde Lewat : De ce que j’entends, j’ai le sentiment que la fracture est surtout générationnelle. Moufida Tlatli, qui n’a encore rien dit, a expliqué il y a deux jours combien il était difficile de faire des films pour les femmes de sa génération, qui sont surtout perçues à travers leur sexe. Je crois que la situation est un peu différente pour nous aujourd’hui. Certes, en tant que femme, ce n’est pas simple lorsqu’on a une famille, mais cela vaut pour toutes les femmes quel que soit leur métier, et pas seulement les cinéastes.
En tant que cinéaste, je m’inscris un peu en faux. Je considère que c’est un peu cela le relativisme artistique. La situation est moins complexe pour les gens de ma génération qu’elle l’a été pour Jeanne Labrune ou d’autres. Je m’appelle Osvalde Lewat, et mon nom fait très masculin. Beaucoup de gens pensent que je suis un homme, et lorsqu’ils voient mes films, je ne pense pas qu’ils se disent qu’il a été fait par une femme parce qu’il est filmé d’une certaine façon… Peut-être ai-je tort, mais cela change. Dans la salle, certaines cinéastes ont visiblement à peu près mon âge : on se bat autant que les hommes, avec les mêmes armes et lorsqu’on envoie des projets de films pour demander des financements, nous sommes jugées sur le talent et le professionnalisme. À mon avis, le sexe entre rarement en ligne de compte. Voilà !
Rahmatou Keïta : Je suis du Niger et je fais des films également. J’ai eu hier une discussion intéressante avec Nadia Elfani. Elle me disait : « C’est marrant, quand tu parles, n’as-tu pas l’impression d’embellir les choses en Afrique ? » Bien sûr, je m’interroge. Mais je crois que nous avons des univers différents ; je disais hier que créer est une quête de soi-même. Je me dois donc aussi de rendre compte de mon univers. Chez moi, on ne pratique pas l’excision. Je ne vais pas faire des films sur l’excision pour faire plaisir puisque ça n’existe pas ! Ça, c’est une chose. Il faut qu’on fasse des films sur l’excision et qu’on se batte contre cela afin d’y mettre un terme, puisque c’est même dangereux d’un point de vue médical. Je pense qu’il faut le dire avec tout notre amour, avec toute notre tendresse à celles qui pratiquent l’excision. Car en effet, ce sont les femmes et je ne suis pas contente lorsqu’on attaque nos hommes à ce sujet ! C’est un « truc », une tradition que les femmes véhiculent. (agitation) Je voudrais terminer… Est-ce que je peux parler ?
C’est aux femmes qu’il faut s’adresser pour que cela cesse. L’Afrique est vaste. Chez moi, au Sahel, la circoncision est une affaire d’hommes (on n’a jamais dit que c’étaient les femmes qui coupaient le zizi des garçons) et l’excision est une affaire de femmes. Si on ne convainc pas nos mères d’arrêter, rien ne changera. Il me semble que la meilleure manière de convaincre n’est pas d’aller leur dire qu’elles sont des sauvages ou des barbares, mais de leur dire qu’il s’agit de quelque chose de très grave, ne serait-ce que pour la santé.
On raconte donc notre univers. Ma mère n’a jamais fait la cuisine ni le ménage : je ne vais pas raconter que ma mère était une femme soumise etc., ce serait faux ! Chez nous, c’est d’abord l’islam qui nous enlève le matriarcat, puis l’Occident vient l’achever. Nos traditions sont restées. Chez nous, une femme divorce alors que nous sommes musulmans ! Or, dans la religion musulmane, une femme ne divorce pas. Maintenant que les intégristes arrivent en force chez nous, je voudrais raconter ce qui se passe chez moi avant qu’ils aient le dernier mot, car ils finiront peut-être par l’avoir. Chez nous, une femme divorce ; élever la voix envers une femme est un motif de divorce. Elle quitte sa maison en disant : « Je ne reviens plus ! » Je dois bien raconter cela ! Je ne peux pas faire autrement. Si j’ai vécu dans une famille qu’on pourrait presque qualifier de privilégiée (car nous n’étions pas riches), j’ai tout de même ma propre souffrance et je cherche à quoi elle peut répondre. Il faut bien que je raconte, c’est mon univers : le Sahel est comme ça. J’ai fait un film sur la carrière de la première actrice africaine, Zalika Souley. C’est une femme forte et, en lisant le scénario, les gens me disaient qu’une femme africaine comme ça, ce n’était pas possible. Je leur répondais que je ne connaissais que des femmes comme ça ! Je ne dis pas qu’il n’y en a pas ailleurs, mais chez moi c’est comme ça. J’aimerais pouvoir poursuivre la discussion avec Nadia après, qui ne sera certainement pas d’accord ! (rires)
Jean-Pierre Garcia : Vous continuerez cette discussion ! Je propose que la parole circule encore un peu. Naky Sy Savané, comédienne de Côte-d’Ivoire.
Naky Sy Savané : Il est clair qu’on ne pratique pas l’excision dans la société de Rahmatou, car lorsque j’entends des choses comme ça, ça me fait bondir. Je suis une artiste qui milite par son travail, mais aussi sur le terrain. Je fais partie des femmes qui ont lutté contre l’excision en Afrique, et lorsque je suis arrivée ici, j’ai continué ce combat avec des amies féministes européennes. C’est pourquoi je me réjouis de voir Madame Labrune, féministe des années 1968.
On entend toujours dire que l’excision est une affaire de femmes. J’ai travaillé avec des femmes et j’ai été jusqu’en Egypte. Lorsqu’on voit un homme envoyer sa femme se faire exciser alors qu’elle avait réussi jusque-là à passer à travers les mailles du filet, on ne peut pas dire que ce sont les femmes qui pérennisent cela. Pour ce qui est des luttes que nous avons menées, quand avons-nous pu commencer à obtenir des résultats ? Les féministes des années 1960 ont apporté un féminisme pur et dur. Elles ne voulaient pas qu’il y ait d’hommes. Nous sommes arrivées et nous avons dit non, car il fallait y associer les hommes. En effet, en Afrique, ce sont eux qui décident. Une fois que nous avons intégré les hommes à notre combat (imams, religieux…), le combat a pu enfin avancer. Il nous fallait une place dans la société. Chacun sait que, dans la société africaine, une femme ne peut vivre en dehors d’un foyer.
Jean-Pierre Garcia : Merci ! Pourrait-on revenir au cinéma ? Je n’ai pas dit « les femmes cinéastes », mais le cinéma, qu’il soit affaire d’hommes ou de femmes ! Moufida Tlatli, qui ne s’est pas exprimée jusqu’à présent.
Moufida Tlatli : Je n’ai pas parlé car je m’attendais un peu à ce type de débat, qui me rappelle ceux que l’on a eus dans les années 1968, 1970, qu’il s’agisse de politique, d’économie, de justice, d’égalité ou de parité. Je me rends compte que cette rencontre est très importante, c’est une initiative magnifique.
Je constate que chaque femme porte en elle son idée du combat, sa façon de militer pour faire un cinéma militant. Je crois que le cinéma est « hors normes », c’est-à-dire que même si on ne le pense pas militant, tout film est militant ! Il peut militer dans n’importe quel domaine, cela varie énormément selon chacune d’entre nous. Dans notre vie, nous avons été confrontées à quelque chose de terriblement fort qui a fait que nous sommes devenues cinéastes et que nous avons voulu en parler. Cette chose est différente chez moi, chez Jeanne ou chez une autre. Chacune a sa réalité économique et sociale ; les problèmes de femmes se posent très différemment. N’aurait-on pas plutôt pu évoquer l’engagement que toutes, en tant que femmes, nous prenons ? Nous sommes des femmes, nous voulons faire des films (quel que soit le type de films) et cela nous réunit. Mais à quoi sommes-nous confrontées ? Quelle est la nature de nos difficultés ? Elles ne viennent pas de nous mais de nos responsables politiques, qui décident ce que nous devons dire ou pas. C’est là la chose la plus importante. Quand on pourra parler librement des problèmes spécifiques aux femmes, on trouvera cette idée de cinéma féminin militant.
À mon sens, le cinéma militant doit intéresser universellement le monde entier. Mes problèmes à moi peuvent intéresser les Zimbabwéens ou encore les Français, qu’ils soient militants ou pas. Je ne saurais le définir.
Ta Chui Mui : It’s a bit tiring for me to follow the whole discussion. I really don’t feel the problems the others have, I never felt disadvantaged as a woman filmmaker. So I start wondering if my country is so different, or if Asia is so different. It’s true there are fewer woman filmmakers than men, but when a woman wants to make a film, she easily gets support, normally. I would say that in Malaysia, it’s quite easy to be a woman filmmaker; much easier than being a Chinese! (laughter) So I don’t know if it’s such a different situation but I also see this in other Asian countries. Women are really not disadvantaged. Sometimes, it can even be an asset since there are so few women among filmmakers! Some of my friends told me that I was going to Cannes because I am a woman! (laughter) I don’t suffer such a disadvantage. Sometimes, I even feel I was advantaged compared to my other colleagues, as a woman filmmaker.
Un intervenant : Bonjour. Hier, je me suis fait lyncher en relevant la possible différence entre les hommes et les femmes. Je vais éviter ce sujet aujourd’hui ! En contrepartie, je vais aborder la différence entre les pays. En effet, je crois qu’Osvalde a parlé tout à l’heure de la différence entre le Cameroun et le Congo. Si je vous ai bien suivie, les femmes sont plus soumises au Congo qu’au Cameroun. […] Elles sont plus contraintes par la loi ? D’accord.
En fait, la question est la suivante : je me suis demandé si on ne devait pas aborder le cinéma et les femmes selon le pays. En effet, j’ai beaucoup de mal à croire qu’en Europe occidentale, en France, en Allemagne, en Angleterre, une femme a plus de difficultés qu’un homme à faire un film. C’est pareil, faire un film est très difficile. Par contre, si on parle par exemple du Mali, du Cameroun ou du Congo, la situation est peut-être totalement différente. Lorsqu’on parle des femmes, on devrait aussi parler des pays. La situation d’une femme au Burkina-Faso ne me semble pas du tout comparable à celle d’une femme en France. Je crois que faire un amalgame entre les problèmes des unes et des autres n’est pas possible. Je dirais même qu’aucune comparaison n’est possible. Peut-être s’agit-il simplement d’un débat de société qui se situe tout à fait en dehors de ce qu’on doit aborder ici : le cinéma. Je n’en sais rien !
Joséphine Ndagnou, cinéaste du Cameroun : Le thème « Cinéma et engagement » m’a tout de suite fait penser plutôt à l’engagement politique dans les films de femmes. Il est vrai que l’engagement englobe d’autres combats, mais je souhaiterais m’attarder sur l’engagement politique. En effet, celui-ci fait peur dans des pays où il n’y a pas de démocratie. En tant que femmes, nous sommes rendues vulnérables par la culture, la situation politique et le manque de libertés. Nous avons peur de nous engager !
Une réunion comme celle-ci me donne l’occasion de vous demander votre avis : que peuvent faire les institutions pour nous protéger de la répression de l’engagement politique dont nous pouvons faire preuve à travers nos films ? En effet, nous avons un peu plus peur : quand on a des enfants, on a peur de faire certaines choses. Les institutions peuvent-elles nous garantir une certaine protection par rapport à l’engagement politique de nos films ?
Lucia Murat : Il est difficile pour moi de répondre. Très jeune, j’ai vécu dans une dictature et le choix de résister, d’agir contre le gouvernement est un choix. On ne peut pas demander à quelqu’un qui nous persécute d’assurer notre sécurité. Cela me semble difficile.
Je suis un peu perdue ici. C’est magnifique, je ne pensais pas prendre la mesure de telles différences entre les pays, entres ces femmes qui entretiennent un rapport particulier au cinéma… Evidemment, il y a des différences entre les pays. L’excision, par exemple, est une chose terrible qui est très loin de la culture de mon pays, mais il est beau de constater que des femmes ont le courage de travailler malgré tout cela.
Il est difficile d’expliquer l’engagement, mais peut-être que toutes les femmes cinéastes réunies ici le représentent, en quelque sorte.
Nadia Elfani : Je voulais rebondir sur la question de la protection des personnes engagées dans leur pays. Ce n’est évidemment pas par hasard si j’ai quitté la Tunisie il y a cinq ans, même si je n’ai pas été directement concernée. Il était pour moi de plus en plus difficile de faire des films, j’ai donc pris la décision de venir ici un beau jour. Je dis toujours que la liberté n’a pas de prix, mais pour elle il faut parfois quitter son pays, sa famille…
En ce qui concerne l’engagement, je viens de réaliser un documentaire intitulé Ouled Lenin. C’est l’histoire de mon père, qui a été l’un des dirigeants du parti communiste tunisien. Il a bien sûr été très difficile de le faire en Tunisie, je me suis battue trois ans durant jusqu’à obtenir une autorisation de tournage. Au mois de mars, j’ai pu le montrer en Tunisie et je pense que le public a été encore plus étonné que moi d’avoir pu le voir là-bas. Il me semble que notre métier de cinéaste préserve : il est très médiatisé et nous sommes subventionnés par l’étranger, ce qui nous apporte une certaine protection. En effet, on sait très bien qu’en touchant à un cinéaste, on verra toute la profession se solidariser pour lui. C’est quelque chose qu’il ne faudrait pas perdre de vue. Il ne faut pas avoir peur de prendre les devants et d’aller plus loin que ce à quoi on nous autorise. C’est ça, l’engagement : pousser toujours plus loin la frontière de ce qu’il est autorisé de faire, dire, revendiquer etc. Si vous êtes à Cannes ou dans n’importe quel autre festival, si on vous touche un cheveu dans votre pays, toute une profession sera en mesure de se solidariser. Je pense qu’il ne faut jamais oublier cela : on a des réseaux, des directeurs de festival, des institutions qui sont là ! On a déjà tenté d’interdire des films et des solidarités se sont alors mises en route.
Il est donc vraiment important de ne pas avoir peur. Les femmes le savent car elles n’ont rien à perdre et tout à gagner ! (rires)
Osvalde Lewat : J’ai parlé tout à l’heure d’un film que j’ai fait au Cameroun et qui s’intitule Une affaire de Nègres. Ce film parle d’un drame qui a eu lieu dans ce pays, à savoir la disparition de plus d’un millier de personnes. Je voulais mener une réflexion autour de la démocratie en Afrique. La question centrale était : y a-t-il une démocratie à deux vitesses, « tropicalisée » ? Est-ce vraiment la même idée de démocratie qu’à l’Ouest ?
J’ai longtemps hésité à y adjoindre une voix off. Habituellement, je n’y ai pas recours, mais cette fois, j’ai pensé qu’il fallait que j’aille un peu plus loin pour présenter cette vision que j’avais du Cameroun. Depuis que le film est achevé, c’est-à-dire depuis peu, on me pose une question récurrente : « N’avez-vous pas peur ? C’est un film courageux ; que risquez-vous ? » Je voudrais dire que la démarche de cinéaste participe d’une certaine obsession. En elle-même, celle-ci finit par exclure la peur. En ce qui me concerne, il ne s’agit pas de courage comme certains peuvent le penser : c’est véritablement le sentiment d’une urgence qui m’a poussée à tourner. On a un sentiment d’irréductibilité, on n’a pas le choix, il faut qu’on le fasse !
Après, pour ce qui est de demander une protection des institutions, je vais un peu reprendre ce qu’a dit Lucia. Notre démarche est en elle-même une démarche de défiance. On peut sûrement être protégées à l’extérieur, grâce notamment aux nouveaux médias d’aujourd’hui. Mais il ne faut jamais occulter le fait que, lorsqu’on fait un film politique, on s’expose. On s’engage, certes, mais on s’expose !
Pas très loin de nous, je pense à l’histoire de Theo Van Gogh en Hollande et à Ayaan Hirsi Ali, qui doit maintenant vivre cachée et sous protection. C’est à cela qu’on s’expose, mais comme le dit Nadia, en effet, on a tout à gagner ! Ce n’est pas en se taisant qu’on fera avancer les choses ou qu’on se protège. C’est en allant au front, en se battant comme certaines femmes se sont battues pour leurs droits qu’on fera avancer cette cause et qu’on parviendra à la démocratie dans nos pays.
Jean-Pierre Garcia : Bravo ! C’est presque une conclusion. Une dernière intervention : Mane Cisteros, du Festival du Cinéma africain de Tarifa en Espagne.
Mane Cisteros : Merci ! J’ai perdu un peu le fil de la conversation. (rires) Je serai extrêmement brève. Je viens d’un pays considéré jusqu’à il y a peu comme un pays du Sud, qui a dû lutter très longtemps pour échapper à une dictature. Comme vous le savez, celle-ci s’est terminée à la mort du dictateur. Je me suis donc posée la question : que s’est-il passé dans mon pays avec les femmes cinéastes ? Pendant la République, la guerre civile et la dictature, dans les domaines littéraire, politique et dans l’enseignement, il y a eu des femmes immenses comme Federica Montseny et tant d’autres. Pourtant, il n’y a pas vraiment eu de femmes cinéastes. Il a fallu attendre Pilar Milo, première grande cinéaste femme d’Espagne, pour que la femme espagnole s’exprime à travers le cinéma. Il a fallu attendre les années 1990 pour voir véritablement monter ces femmes, qui sont aujourd’hui très engagées. En Espagne, il n’y a pas de femmes cinéastes qui ne soient pas engagées.
En vous écoutant, je me suis demandée ce qui s’était passé dans mon pays pour que les femmes n’utilisent pas le cinéma pour combattre et créer la nouvelle Espagne. Voilà, c’était une réflexion !
Jean-Pierre Garcia : Merci. J’aurai, non pas une synthèse, mais une dernière parole. Il s’agit peut-être d’une réflexion d’homme, ou d’être humain… (rires) En posant cette question de l’engagement, on voit très vite que cette idée peut prendre de très nombreuses formes différentes. Cela dépend des individus. Nous sommes ici un petit panel, nous sommes des gens de cinéma, mais la notion d’engagement est extrêmement vaste, elle recouvre des réalités très diverses dans chaque pays. À l’intérieur d’un continent et même d’un pays, selon les milieux, les classes sociales, les moyens, les générations, les situations sont difficilement comparables. Il n’est pas impossible de mener ce débat, mais les différentes cinéastes présentes aujourd’hui peuvent témoigner du caractère unique de leur situation et de leur expérience de vie. Il y a une très grande diversité, toute une série d’histoires, parfois avec un grand H. L’échange pour faire avancer les choses est passionnant. Ce n’est plus comme lorsque j’avais vingt ans, quand on croyait pouvoir tout faire et tout régler, mais on n’accepte pas pour autant de laisser tomber ! On réagit, on se bagarre, et dans le domaine du cinéma en France, il existe des festivals pour cela. On peut aussi en parler, car je suis directeur de festival. Dans les prochaines années, ce ne sera pas forcément simple en termes de possibilités de financement et donc d’accès à la culture, aussi bien pour nos jeunes spectateurs que pour des publics plus spécifiques, tous deux défavorisés. Nous aurons à faire ce travail de mise en relation entre le cinéma et un public le plus large possible, en France et dans le monde.
J’ai notamment été très sensible à ce que Ta Chui Mui nous a dit sur la situation en Malaisie, peut-être parce que c’est ce que je connaissais le moins. Là-bas, sa situation de cinéaste ou de femme n’était pas le plus important : elle est chinoise, elle appartient donc à une « minorité » à l’intérieur d’un pays. Sa difficulté à comprendre la situation dans d’autres pays montre aussi tous les pas que nous avons à faire vers certains pays, et que certains pays ont à faire vers d’autres, quels qu’ils soient.
Moufida Tlatli : Je pense que la différence ne vient pas de nous et des problèmes particuliers à nos pays, contre lesquels il faut faire un cinéma engagé. Je crois que la difficulté de ce débat vient du fait que nous sommes plusieurs pays, aux réalités économiques, sociales et politiques différentes. Elle ne vient pas seulement de notre propre tempérament, de notre personnalité ou de notre volonté de militer ou non. Chacun est, dans son pays, confronté à une réalité différente ! On ne peut donc pas se battre de la même manière, chacune doit disposer d’armes adaptées à sa propre réalité pour pouvoir avancer. Et c’est à nous de le faire ! Les institutions vont peut-être nous soutenir ponctuellement si on a un souci, mais pour le reste, c’est à nous de continuer à nous battre chacune dans notre pays, pour arriver à nous exprimer encore plus librement et sans cette peur au ventre qui nous saisit lorsqu’on veut toucher à des sujets qui dérangent. (Applaudissements)

Transcription : Thibaud Faguer-Redig///Article N° : 7937

  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Laisser un commentaire