Rencontres « Maintenant l’Afrique ! »

Rapport de synthèse de l'Atelier Cinéma Audiovisuel

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Quatre ateliers thématiques ont été organisés par CulturesFrance le 23 octobre 2006 en préparation des Rencontres « Maintenant l’Afrique ! » Ces ateliers avaient pour but de dégager les principales problématiques des filières artistiques afin de nourrir les débats du colloque. Une trentaine de professionnels, dont des représentants d’organismes d’appui à l’audiovisuel en Afrique, ont participé à l’atelier Cinéma, animé par Olivier Barlet.

Les réflexions des participants ont porté, pour l’essentiel, sur la problématique et les tendances de l’économie du cinéma et de l’audiovisuel en Afrique. Les échanges peuvent être regroupés autour des cinq points :
– les marchés et les débouchés économiques nationaux
– l’accès au marché international
– les outils de la coopération bilatérale et multilatérale
– les questions soulevées par le numérique et les NTIC
– la sauvegarde et la valorisation du patrimoine cinématographique africain.
Marchés et débouchés économiques nationaux
– Les participants ont fait le constat que la créativité africaine dans le cinéma et l’audiovisuel est appréciable. Le véritable enjeu actuellement est de savoir comment favoriser l’émergence et la structuration d’un marché.
En effet, l’importance de l’offre d’images en Afrique contraste avec la disparition progressive des salles comme lieux de consommation collective de films. L’état du parc de salles ne répond plus aux réalités sociales et démographiques.
Quant aux chaînes nationales de télévision (publiques et privées), elles sont dans une position de repli et n’ont aucune politique active d’acquisition ou de commande de films et de productions audiovisuelles. En outre, le marché de la vidéo est complètement étouffé par la piraterie des œuvres.
– La relance des marchés par un cinéma dit populaire a été une option largement débattue. La définition du cinéma populaire pose problème, mais le postulat de base est d’offrir aux publics les films qu’ils attendent, c’est-à-dire d’intégrer en amont les questions de diffusion et de distribution.
– Les participants ont également fait le constat que le marché du cinéma en Afrique est en avance sur les professionnels. Une nouvelle économie est en train de se développer en dehors de toute logique institutionnelle, souvent non professionnelle (c’est le cas de certaines productions en vidéo), ou basée sur la piraterie des œuvres (cf. les lieux non autorisés de projection payante de films).
– Le modèle économique de la home vidéo nigériane est exemplaire à bien d’égards, mais il ne peut être exporté dans la majorité des pays africains. L’expérience du Maroc est apparue tout aussi exemplaire.
En tout état de cause, pour asseoir les bases de la structuration du marché, les participants estiment nécessaires :
– une volonté politique des États en Afrique pour mettre en œuvre des dispositifs d’encadrement et de dynamisation des marchés nationaux et régionaux par des instruments juridiques, financiers et fiscaux adaptés.
– La lutte contre le fléau de la piraterie des œuvres. La piraterie assassine le droit d’auteur et dissuade tout investissement d’envergure dans le secteur.
– La nécessité de professionnaliser l’ensemble des filières en repensant les programmes de formation qui sont aujourd’hui plus focalisés autour des créateurs et qui ne prennent pas suffisamment en compte les métiers techniques et ceux relatifs aux aspects économiques et entreprenariaux.
– La nécessité d’encourager l’entrée dans le secteur de véritables entrepreneurs pour favoriser les investissements nécessaires et dynamiser le marché.
L’accès au marché international
– Les participants ont déploré le fait que très peu de films africains aient, actuellement, un accès au marché international et notamment aux chaînes de télévision en Europe. Tandis que dans les années 1980 des chaînes comme Channel Four (Royaume-Uni) ou Canal Plus (France) avaient une politique volontariste d’intégration de ce cinéma dans leur grille de programme.
– Dans le rapport au marché international, la qualité des œuvres est nécessaire mais cette qualité viendra de la quantité. Or le volume de production africaine demeure relativement bas malgré l’émergence de productions sur support vidéo numérique.
Les outils de la coopération bilatérale et multilatérale
– Les participants se sont félicités des différents mécanismes d’appui de la coopération qui ont permis à de nombreuses œuvres d’exister. Ils s’inquiètent cependant de la baisse des budgets consacrés à l’appui au cinéma et à l’audiovisuel. Certains organismes d’appui ont pu maintenir leurs ressources financières, mais ils ont été amenés à élargir leurs champs d’intervention.
– Les participants ont constaté en outre que les notions de marché et de structuration d’une économie ne sont pas suffisamment prises en compte dans les dispositifs actuels d’appui au cinéma et à l’audiovisuel. Ceux-ci ont certes permis l’existence d’œuvres et d’auteurs, mais il serait souhaitable de repenser la coopération pour évoluer vers un accompagnement des démarches et initiatives entreprenariales.
– Pour les besoins d’investissements lourds dans le secteur (touchant par exemple l’exploitation et les prestations techniques) un accompagnement des entrepreneurs est souhaitable sous la forme d’instruments financiers (tels que des fonds de garantie) facilitant l’accès à des financements.
– L’exclusion des pays d’Afrique du Nord de certains mécanismes de financement de la coopération multilatérale est apparue regrettable.
– La question de la mutualisation des ressources financières des organismes d’appui a été évoquée. Cela soulève des contraintes liées aux procédures administratives propres, aux instruments financiers et aux zones géographiques couvertes. Mais le souci d’harmonisation et de rationalisation a conduit à une collaboration entre certains organismes en termes d’échanges d’information, de participation à des actions communes, etc.
– Il est apparu également souhaitable de mettre en œuvre des actions de sensibilisation et d’accompagnement des pays qui le souhaitent pour l’élaboration de politiques d’appui au développement et à la structuration du secteur. Les Etats manquent souvent d’expertise dans ce domaine.
– Il convient enfin de clarifier systématiquement le statut juridique du soutien financier des organismes en terme de droit généré pour les coproducteurs. La question est de savoir si les parts des coproducteurs liées au soutien financier reviennent au coproducteur européen ou africain. Certains organismes le font déjà, mais il y a une nécessité d’harmonisation.
Les questions soulevées par le numérique et les NTIC
Le secteur du cinéma et de l’audiovisuel est à la croisée des chemins. Une nouvelle page est en train de s’ouvrir. Les nouvelles technologies bouleversent l’économie du secteur et apparaissent comme des moyens appropriés pour l’Afrique de produire davantage et d’atteindre un public plus large.
Si les supports numériques et les NTIC ouvrent de nouvelles opportunités, l’enjeu est de savoir comment l’Afrique est préparée à se les approprier.
A cet égard, les participants s’inquiètent de la politique offensive d’un nombre très restreint de groupes de médias qui risque de concentrer l’ensemble des droits d’exploitation et de diffusion par Internet des meilleurs films africains.
Il apparaît donc nécessaire qu’une réflexion soit engagée pour favoriser une pluralité d’opérateurs sur le marché de la diffusion des films par les NTIC.
La sauvegarde et la valorisation du patrimoine cinématographique
– Les participants déplorent les insuffisances actuelles concernant la sauvegarde et la valorisation du patrimoine cinématographique en Afrique.
– Ils se félicitent de l’action de la Cinémathèque Afrique (désormais intégrée au sein de CulturesFrance) qui assure la valorisation et la circulation du patrimoine du cinéma africain et sa conservation par le biais du programme de numérisation mis en œuvre avec la direction de l’audiovisuel extérieur du ministère français des Affaires étrangères.
– Les participants invitent cependant à étudier des passerelles entre l’action de CulturesFrance dans le domaine de la sauvegarde et de la valorisation du patrimoine cinématographie africain et celle de la Cinémathèque africaine abritée par le Fespaco.

///Article N° : 5802

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