VHS – Kahloucha

De Nejib Belkadhi

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Un vrai virus, le cinéma ! Dans Cinéastes à tout prix !, Frédéric Sojcher donnait l’exemple de Jacques Hardy, professeur de lycée, Max Naveau, projectionniste et Jean-Jacques Rousseau, maçon, des Belges passionnés qui mobilisent tout leur entourage et leurs faibles moyens pour faire des films correspondant à leur passion, une imitation hyper-low budget des films d’action. Ils ont un homologue tunisien : Moncef Khaloucha. Nejib Belkadhi l’a trouvé à Sousse. Le film démarre ainsi sur le tournage d’une scène d’action dans un entrepôt. Poursuite, bagarres, meurtre : la caméra suit en courant les protagonistes. Tout est improvisé et tourné très vite, surjoué par des acteurs pris sur le tas, mais c’est tellement spontané, sincère et surtout proche car tourné dans le quartier que les hommes se réunissent volontiers pour le regarder dans la même ambiance qu’un match de foot quand le film tourné en VHS est montré à la télé du café. Les femmes ne pouvant pénétrer dans ce lieu d’hommes doivent le louer (1,5 dinar) pour le voir chez celles qui ont un magnétoscope…
Ces séries B, Moncef Khaloucha les a complètement en tête avant de les produire avec une incroyable énergie. Il y croit si fort qu’il arrive à mobiliser acteurs, cameraman et monteur sans aucun moyens. Il négocie dur ses accessoires au marché, s’entaille le bras pour barbouiller de sang les victimes et arrive même à mettre le feu à une maison pour filmer ensuite l’action des pompiers qui viennent éteindre l’incendie ! Le film fourmille d’hilarantes anecdotes mais jamais il ne méprise son sujet : c’est bien cette passion du cinéma qui fascine le réalisateur. Non seulement Khaloucha raconte à tout prix des histoires, mais il arrive à réunir tout le monde pour les regarder. C’est une communauté, celle du quartier populaire de Kazmet mais aussi les immigrés tunisiens rencontrés en Italie, qui s’esclaffe d’une seule voix dans une ambiance déchaînée en regardant son dernier film, Tarzan des Arabes, et n’en revient pas de voir que la chose est possible : Khaloucha se débrouille pour goupiller des films de bric et de broc qui sous couvert de films de genre vaguement imités finit par parler à cette communauté de sa propre énergie de survie.

///Article N° : 4442

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