Gabon : Naissance d’une littérature : Chantal Magalie Mbazo’o Kassa une romancière en pleine croissance.

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Après de nombreuses années de balbutiements, la littérature gabonaise, en particulier le roman, connaît de progrès remarquables depuis 1980. Dans ce mouvement d’éveil intellectuel, les femmes affichent nettement leur détermination à promouvoir par l’écriture le patrimoine culturel national jusque-là mal connu du public africain et francophone. Déjà, à l’actif de son bilan deux romans, Sidonie et fam, le jeune auteur s’annonce dans l’espace de la créativité littéraire féminine comme une étincelle que le talent fera croître pour devenir flamme.
La première publication d’inspiration fortement sociale, se remarque par l’actualité du thème abordé et l’angoisse suscitée par les discours tabous qu’il convoque. La deuxième, fam, qui nous intéressera plus tard marque une rupture de style, à la fois au niveau thématique et du champ poétique. Avec ce titre, l’auteur signe un pacte dans une option littéraire novatrice par l’humour théâtral et la satire des mœurs politiques qui vicient une société imaginaire dont on imagine, à tort ou à raison, quelle pourrait bien être la société de son territoire. Sidonie qui nous préoccupe principalement dans ces lignes apparaît comme le prodrome des ambitions littéraires que le public espérait longtemps des femmes gabonaises.
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Quand paraissait en 1985 Élonga, roman de 261 pages de Ntyugwétondo Angèle Rawiri, le public gabonais saluait avec enthousiasme l’ardeur de la première femme à s’investir sur le champ de l’écriture. L’événement forçait l’admiration surtout en ces années où peu d’hommes, universitaires ou autodidactes, se hasardaient à écrire.
Perçu comme un exercice laborieux et improductif, une activité marginale, l’acte d’écriture suscitait peu de vocations pour ne pas dire qu’il laissait quasiment indifférent. On s’imaginait à peine, en ces temps, que ce premier roman féminin dont les sous thèmes oscillant dans la périphérie des réalités socioculturelles (sorcellerie, fétichisme, tyrannie des coutumes et des traditions, législation trop dirigiste etc.) obliquent vers le centre de la problématique de l’amour, traçait le sillon qu’emprunteront les futures générations d’écrivains. L’histoire rétablit les faits dans la réalité d’une littérature qui connaît aujourd’hui une mobilité au-delà des prévisions. D’autres romancières ont élargi le palmarès : Justine Mintsa, auteur de Un seul tournant Makôsu et Histoire d’Awu Ntsame Sylvie qui a déjà à l’actif de son bilan deux romans publiés aux Éditions L’Harmattan et un premier ouvrage professionnel sur le secrétariat.
En publiant Sidonie , Chantal Magalie donne dans les douze chapitres du roman le ton d’une écriture nouvelle, incisive et perspicace. Une écriture qui s’illustre par un style où le pittoresque côtoie le pouvoir évocateur de l’imaginaire, où le pathétique fait corps avec la révolte, où le sublime du confort frôle la débâcle, le tout ficelé dans l’armure des métaphores dont la sémantique et l’abstraction des images, la poétique de l’expressivité du discours séduisent le lecteur.
Sidonie, une métaphore oxymorique
Ce qui interpelle la curiosité du lecteur, c’est avant tout le titre, ses déclinaisons multiples, ses contresens, ses paradoxes. En lui-même déjà, il vaut tout un emblème. Sidonie donne à entendre une séductrice résonance. Elle préfigure un personnage aux allures bienfaitrices dignes des saints du panthéon judéo-chrétien. Sidonie ! On se méprendrait à y voir un visage beau, éligible à une certaine béatification. Or, en fait, il n’en est rien. Sidonie du titre – qui est aussi l’héroïne – est une métaphore oxymorique, une antonomase qui incarne, dans l’œuvre tous les maux de la planète : souffrances et douleurs, solitude et isolement, platitude, rejet et déréliction…
Sidonie paraît donc être un doux mélange de « l’Ange » et de la « Bête ! » Elle use d’artifices et de stratagèmes qui mènent à la mort. Elle est la mort même qu’elle sait incarner et répandre du début jusqu’à la fin du récit. Décryptons l’énigme, dévoilons le secret en disant sans plus de détour que Sidonie est cette maladie de l’amour qui entre sans effraction dans la demeure intime de ceux qui défient par l’imprudence ses ardeurs fatales : le Sida. Loin donc de l’image angélique et noble qui sourd de la musicalité du nom, elle est farce, détour, esbroufe !
La malice de Sidonie se déploie à travers l’euphémisme dont use l’auteur pour voiler un des maux, peut-être le plus grand des derniers siècles. Ce personnage qui sème la terreur dans le texte est désigné par le pronom personnel « Elle. » « Elle », c’est Sidonie. Ce nom par procuration est celui du spectre qui agit sur le territoire des sujets tabous, celui de la sexualité. On comprend qu’elle ne veuille pas révéler son identité, qu’elle refuse de se faire connaître, de se faire nommer autrement que par un prénom qui cesse d’être personnel pour devenir impersonnel, indéfini, obscur. Sidonie, disons plutôt Elle, est une épithète qui, tel un funambule jonglant sur une corde, joue la manœuvre insidieuse de la ruse nominale pour séduire ses victimes et les loger à leur demeure ultime.
L’habileté linguistique de l’écrivain, qui choisit l’énigme pour ne pas décliner crûment l’identité funeste de l’agent soustracteur des vies, donne à considérer l’œuvre comme un long voyage qui mène jusqu’aux confins du surréalisme. D’emblée et d’entrée de jeu, elle refuse d’angoisser, de faire frémir le lecteur en commettant l’erreur, par souci de transparence, de nommer le mal, d’ôter le pansement de cette plaie béate qui phagocyte la société moderne en réduisant sa démographie. Ce souci de la pudeur consacre paradoxalement l’élégance du style. Il traduit aussi la prévenance, la finesse de la vision intérieure de l’auteur face à un phénomène de société qui, révélé sans détour dans les proportions de sa totalité, présenté dans le cru de son appellation, porte inéluctablement dans son étrange nature le danger de choquer les consciences.
Une toponymie qui dit le danger
« Le Divorce ? » Tout part de là, de ce bar populaire au nom à la fois évocateur et provocant. Evocateur en ce qu’il suggère l’idée de rupture, de scission, de séparation. On ne divorce que d’avec un intime, un proche. Le bar semble engager sur la voie de la discorde et de la solitude. Provocant parce que, d’une part, le mal social le plus combattu depuis la nuit des temps est bien le culte de la différence et toutes les théories s’y rapportant ayant pour finalité le cloisonnement de l’homme. Provocant d’autre part, parce que la vocation d’un lieu de réjouissances publiques est de concilier les humeurs individuelles, de les fondre dans une certaine convivialité. L’appellation « Le Divorce » contredit a priori cette conception philosophique des espaces de détente et de distraction. Elle est le lieu des dangers. Justement, cette contradiction apparente paraît être l’expression des paradoxes qui vont teindre le cours des événements dans l’œuvre.
Un jeune cadre fortuné, conseiller du ministre de l’Habitat, logé et véhiculé, marié et père de famille, débarque dans un bar populaire, puis succombe aux charmes de la servante. Tel est en un mot le point de départ d’une histoire pleine de retournements et de surprises. L’intrigue prend naissance là, dans ce lieu d’ambiance, « Le Divorce. » Une de ces « cités sans loi », sans règle de jeu, sans code de conduite. Un bar ouvert à tous, où tous se côtoient, se confrontent, s’affrontent dans la promiscuité et le délire hystérique entretenu par des rythmes sonores, assourdissants qui égayent le bas peuple. Au bar « Le Divorce », aimer va cesser d’être un acte d’affection pour devenir un casus belli, un crime. Aimer, c’est finalement mourir.
Le récit reproduit deux espaces de loisirs pour riches et pour pauvres. « Le Divorce » s’oppose au « Meeting Potes » (chapitre 6), autre bar prestigieux qui affiche par le coût onéreux des mêmes produits sa tendance au luxe, et donc à la sélection des clients. L’auteur décrit le bar comme « un endroit connu pour la qualité de son service et de sa clientèle. La bière y coûte deux fois le prix habituel. Pour la patronne, c’est une manière subtile de filtrer les clients. N’y viennent donc que ceux qui ont un portefeuille assez lourd . »
Déjà, l’anglicisme de la désignation dans une société plurilingue où le français, langue nationale, cohabite avec les langues maternelles interdit l’aventure. Il subsume par l’exotisme singulier des concepts le caractère sélectif de l’accès et l’appartenance du milieu à la classe des fortunés. Les deux bars « Meeting Potes » et « Le Divorce » représentent par leur structuration et leur distanciation ontologique au sein d’une même société, l’écart, la différence. C’est le nord et le sud, l’apartheid qui tait son nom. Sur la balance de ses moyens, chaque individu évalue son poids économique et reconnaît, par déduction, le territoire qui correspond à son statut. C’est le manichéisme classique qui oppose la frange minoritaire des riches à la masse des prolétaires. Le mal gît dans le dernier camp. C’est pourquoi « Le Divorce » est le théâtre des abominations, le terroir des « faits divers », des scènes insolites. En montant la barre d’accès à des hauteurs financières infranchissables, « Meeting Potes » se met à l’abri des fresques que savent tisser sans égards ni retenue les acteurs du bas peuple, habiles fabricants d’intrigues barbares. Trop habitués à la vie sans norme, ces gens ont par principe horreur de la correction et savent défier la vertu par l’audace et l’insolence que procure le delirium tremens. L’auteur note à ce sujet :
« Un client ivre, comme il y en a souvent, s’énerve. Il tape du poing sur la table et crie, d’une voix tonitruante :
– Eh, gérante, on fait de l’œil au petit cadre ? Pas la peine de te fatiguer. Des mecs comme lui utilisent des filles de ton genre et les jettent comme des vieilles chaussettes trouées. Si tu veux faire un bébé, fais la causette. Si tu veux te marier, tire-toi. Allez, viens servir tonton. Deux bières et vite ! »
Elle ajoute dans le même sens :
« Un autre client, excédé par le traitement préférentiel que la serveuse semble accorder à l’inconnu, ajoute :
– Cadre ou pas, nous sommes tous ici capables de payer nos consommations. L’argent n’a pas de classe sociale. Pas vrai ? Qu’on ne nous fasse pas poireauter pour rien, sinon, nous irons faire la recette ailleurs . »
Au bar « Le Divorce », les commodités de langage, les convenances du savoir être n’ont pas droit de cité. Rien de commun avec « Meeting Potes », lieu sobre, refuge des adeptes paisibles de l’aisance. Le bar « Le Divorce », c’est le premier prix, les marches du rez-de-chaussée accessibles au commun des mortels. On comprend donc qu’il soit le théâtre de la scénographie qui met en confrontation des classes sociales opposées.
Quand l’acte d’amour déclenche la guerre
Une rencontre banale, anodine, triviale, pareille à des milliers d’aventures qu’abritent les instances bacchantes, les espaces de loisirs comme « Le Divorce », va démontrer que l’acte d’aimer n’est pas toujours sans danger. C’est là, et non ailleurs, qu’a lieu l’odyssée. En usant de ses fureurs naturelles elle y prend forme sous l’exutoire du hasard pour déjouer le destin des victimes en sursis. Les victimes que le hasard programme comme la ration des prisonniers dans une maison pénitentiaire ! L’image suggère le mythe de l’incontournable bar qui reçoit la visite inattendue d’un haut cadre. Comme surprise, il n’y en a point de plus grande ! Et ce dernier, proie du fatum, tombe sous les charmes envoûtants de la gérante. La maîtresse des lieux, « Elle », la terrible, l’indicible, l’innommable tient de haute main l’officine. Intrus et courtisan, voilà le double délit du jeune cadre qui sera condamné à payer les frais du viol causé par sa présence dans un milieu populaire peu recommandable eu égard à son statut. Elle, l’éponyme, qui a le réflexe facile, le regard scrutateur, l’instinct fertile, a tout compris d’un trait. Cet homme à part entière est à n’en point douter un homme entièrement à part. Quelque souci le traumatise, peut-être l’aigre de l’existence, le « mal de vivre. » Le dégoût de vivre, la mélancolie existentielle, disons comme Baudelaire le « Spleen » l’attriste et explique sa chute du piédestal de son rang à la base populaire. Autrement, il ne serait pas là. Il souffre d’un mal dont Elle, la gérante, en est peut-être la solution ?
« L’homme est timide, embarrassé, agressé par la beauté de la serveuse. Point de mire du bar Le Divorce, elle vole de table en table, sans répit. Sollicitée de toute part, elle surveille discrètement du regard le client de la table 5. seul, il semble préoccupé : quel mal étrange ronge ce fils du pays . »
Faite en un tour d’éclair, la cogitation de la gérante débouche sur une certitude : cette présence est le signe de la volonté du Salut enfin favorable à l’accomplissement de ses espoirs. Le bonheur dont Sidonie a si longtemps rêvé est finalement au rendez-vous. Agir pour le quêter, le conquérir et se l’approprier est la réponse qu’appelle l’offre providentielle. Ainsi, elle pourra couper le cordon ombilical qui la condamne à sa pauvreté native :
« La serveuse est plus offensive, plus sûre d’elle. Elle se libère des exigences des habitués, et se dirige enfin vers le nouveau client . »
L’insolence de la fortune du jeune cadre est doublement trahie par son élégante apparence et le luxueux véhicule 4X4 qui lui sert d’appeau pour séduire sans effort. Dans ce « bar des pauvres », la présence d’un cadre ne peut passer inaperçue. Au mieux, elle attire la convoitise des mendiants qui quémandent sa charité ou espèrent tirer profit de ses largesses bourgeoises, au pire la haine naturelle vouée à la classe des nantis. Déjà, la gérante ne manque pas de s’interroger du fond de son cœur :
« Pourquoi a-t-il atterri dans ce quartier populaire, lui, jeune cadre bien dans sa peau : marié, salarié, logé, véhiculé ?  »
L’aventure qui prend les allures d’un rêve se poursuit comme on peut l’imaginer entre deux personnages qui s’attirent. Très vite, au deuxième chapitre (p. 17), le couple se voue au culte d’Aphrodite. L’homme vient ainsi d’inscrire à l’actif de son bilan de conquérant une victoire singulière. Il ignore qu’il récoltera du vent semé sous les clameurs du plaisir la tempête du plus rude désespoir. Entrer dans cette intimité étrangère dont il n’a pourtant pas besoin, à côté de sa femme docile au foyer et mère de leurs deux enfants, ne peut donc être un acte gratuit. Très vite épris l’un de l’autre, les amants font l’expérience des foudres amoureuses qui s’emparent des êtres affectueux et les condamnent à la volupté hédoniste. Telle une rivière en crue, la pression chez la femme monte et la rend esclave de la virilité de cet homme hors du commun et avec lequel elle a pris l’habitude de passer des moments de bonheur. Sans relâche, elle clame sa passion amoureuse et se voit, sans le vouloir, en état d’exiger sa présence permanente à ses côtés. Elle guette son ombre, sa silhouette à travers les lacis des ruelles, puis tombe dans le courroux à force de se faire languir. Sidonie qui sait enlacer, poursuit sa proie jusqu’à ses derniers retranchements. A son poste de travail, elle le surprend :
« – Qui est là ?
– C’est moi, Sidonie.
– Qu’est-ce que tu veux ?
– Quelle question ! C’est ainsi que tu reçois tes invités ?
– Je me permets de te rappeler que je ne t’ai pas invitée. Tu t’imposes.
– (…) Et moi je te signale que je ne m’impose pas. Je te veux et tu le sais. J’essaye seulement de tout faire pour être présente dans ta vie.
– On se connaît depuis peu et tu veux déjà m’apprivoiser ?
– On se connaît depuis peu et tu veux déjà m’oublier ?  »
Les retrouvailles avec la dulcinée d’hier ne semblent plus susciter l’enthousiasme de l’amant. La conversation prend l’allure des polémiques et paraît paradoxalement traduire l’intensité des désirs, la fureur des pulsions naturelles qui attirent l’un vers l’autre. Comment autrement expliquer la force de l’amour si on ne situe son origine dans la violence des sentiments ?
Mais l’homme qui ne semble plus à la hauteur de l’épreuve, s’essaye à l’éclipse. Se dérober après le passage de Sidonie n’est qu’un coup d’épée dans l’eau. Le tour est joué depuis longtemps, depuis le jour des premiers ébats. Sidonie a apposé sa signature indélébile. Pour toujours. Elle agit comme cet appareil volant imitant l’oiseau naturel qui ne sait qu’avancer, incapable de faire marche arrière. La graine ensemencée germe, croît lentement mais sûrement. Aidée dans sa croissance par les tracasseries et les rebuts de l’héroïne à l’égard de l’homme, Sidonie manifeste les signes de sa présence inavouable dans l’organisme de la victime. Le remords et l’amertume se conjuguent avec une certaine rancœur nourrie contre celle qui vient de bouleverser le cours de son histoire, de son destin. Il n’y a plus d’échappatoire pour l’homme !
Les étapes de la chute sont ponctuées dans l’œuvre par un chapitrage gradué au rythme du sort qui frappe jusqu’à l’extinction définitive du héros. Au chapitre 3, il fait l’aveu de l’adultère, de cette relation coupable ayant engendré le spectre qui l’habite. A ce point du parcours, les résistances tombent. L’homme sort de sa réserve. Tandis qu’il recherche dans son entourage les soutiens susceptibles de l’aider à supporter le poids du fardeau (chapitre 4), il affronte au chapitre 5 les réalités habituelles qui accompagnent le drame du Sida : La délation, le dénigrement, le regard des autres, surtout ce dernier point : le regard des autres, cette flèche que nombre d’individus ont le génie de savoir décocher sans vergogne ! Tous ces corollaires de la maladie constituent des mélodrames plus intenables, plus corrosifs, plus érosifs que le mal lui-même.
Au « Meeting Potes  » où il devise avec son collègue du ministère, l’homme surprend, étonne par des artifices inhabituels auxquels il a désormais recours pour tenter de s’évader de sa « prison. » Il tient une cigarette fumante, lui, qui ne fumait jamais :
« Attablés devant des verres à moitié pleins, les yeux dans les yeux, cigarettes fumantes aux doigts, ils devisent tranquillement. Depuis quand fume-t-il ? Il s’en étonne. Il sait seulement que la recherche de la sensation grisante et étourdissante de cette drogue douce l’empêche de réfléchir sur son sort et de s’énerver. Contre lui-même . »
Le recours à la cigarette devient un rempart pour juguler le mal. Il n’y a pas que la cigarette. Il y a aussi le vin. Les deux substances hallucinogènes le propulsent dans l’univers informe des illusions, une sorte de « Paradis artificiel » au sens baudelairien du terme, où il espère se recréer autrement que dans la réalité, échapper à cette réalité trop prégnante, trop envahissante et devenue insupportable. Cette fuite du réel à travers le mirage de la drogue joue ici un rôle moteur pour la compréhension de la psychologie du personnage.
La drogue comme refuge, asile, instrument d’évasion apparaît dans la mythologie greco-romaine sous une forme divinisée. Dionysos ou Bacchus (pour les Romains) est la divinité du vin à laquelle on prête le pouvoir d’assurer la protection de ses disciples, c’est-à-dire des alcooliques. Les Bacchanales représentaient pour les Romains des moments forts d’orgies et des réjouissances en l’honneur de Bacchus. Ces moments donnaient lieu à l’enivrement sans mesure des manifestants.
Les Dionysiaques fêtées au printemps et en automne par les anciens grecs constituaient un culte institué pour célébrer le dieu de la vigne. La théorie cosmologique qui conforte l’autorité du vin réside dans le mythe du pouvoir qu’il exerce sur la conscience en la propulsant dans les nuages de l’évasion. Dans le courant romantique, C. Baudelaire est celui qui aura le plus pactisé avec la drogue. Il en loue les performances et la tient comme panacée contre les tumultes de l’humaine condition qu’il désigne dans sa langue pure de « Spleen. » La drogue est le meilleur mirage qui conduit à l’Idéal de l’être perçu dans les limites de la servitude à laquelle le réduit l’aventure de l’existence. C’est cette pédagogie qui ressort de ses nombreux poèmes en prose. « Du vin et du haschich » raconte l’anecdote de deux clochards ivres qui s’embarquent pour le bonheur, l’un soutenant l’autre, tous deux ravis, en route vers le « plein-mer de la rêverie » et « jusqu’au rendez-vous du bonheur. » Dans « Enivrez-vous », le poète conseille qu' »il faut être toujours ivre. Tout est là, c’est l’unique question […] Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous. »
Dans « Le vin », Baudelaire présente le recours à l’ivresse comme solution à l’apaisement qui permet d’échapper au malheur ou, tout au moins, de l’oublier. Le poème « Invitation au voyage » est un psaume dans lequel l’auteur loue les vertus du vin et en fait un habile moyen de fuir les tracasseries du monde. Le vin permet d’atténuer les « chagrins journaliers » et de ranimer les « plus vieilles espérances . » En somme, C. Baudelaire commue en vertu les vices du bas monde qui affectent l’existence humaine.
La drogue paraît alors constituer pour le jeune Cadre une porte de sortie pour fuir le monde carcéral de Sidonie. Elle lui permet de fuir sa propre individualité, d’être face à soi-même, c’est-à-dire de se regarder comme une entité étrangère à soi. Elle est brisure, cassure, fragmentation de l’unité ontologique. Ici, le mal n’est plus ailleurs. Il ne sourd plus du néant. L’enfer n’est plus les autres. Il est soi-même, en soi-même, dans cet autre moi qui me combat et me torture. Un peu comme Monsieur Meursault dans L’étranger de Camus, en querelle avec sa conscience après l’assassinat de l’Arabe, le jeune cadre ressent le chagrin d’être le bourreau qui a voué sa propre personne aux gémonies. Ici, l’absurde se lit dans la relation conflictuelle intérieure qui fragmente le personnage en l’opposant à lui-même et en déniant le lien qui le rattache à l’acte accompli. Etranger devenu, il se donne à voir comme un être totalement déréglé, morcelé. C’est pourquoi le jeune homme tente d’échapper à sa propre image. Et si, néanmoins, il reconnaît implicitement sa culpabilité, force est de constater l’effort par lequel il s’emploie à innocenter son produit cartésien, c’est-à-dire cette ombre de lui-même, l’être damné souillé par la maladie et qui n’a plus d’humain que la charpente de son squelette. La drogue – le vin et la cigarette – lui donne l’occasion d’opérer la fragmentation dualiste de sa personnalité. Elle le condamne à nier celui qu’il est pour devenir une créature factice qui n’est qu’une simple construction de ses mythes. Comprimé dans cette contradiction, il a soudain le courage des mots interdits. La drogue lui arrache des lèvres le terrible aveu longtemps confisqué par la peur :
« – Figure-toi que j’ai deux amours.
– Ah ?
– Ma femme et Sidonie. Et je suis l’homme le plus malheureux du monde.
– (…) Pourquoi ? Pourquoi sommes-nous les artisans de notre propre malheur ?
– Parce que le pouvoir et l’argent nous montent à la tête et nous croyons pouvoir tout acheter, mon ami…  »
Deux éléments interpellent la réflexion dans l’attitude du fonctionnaire :
– La tentative d’échapper à Sidonie qui modifie son ontologie, le champ de ses rapports avec lui-même, c’est-à-dire sa personnalité.
– L’obsession de sortir de soi, de sa singularité pour trouver refuge dans l’autre.
Comme nous l’avons souligné déjà, la drogue lui sert d’exutoire pour emprunter cette passerelle. Elle est un élément de refoulement qui lui permet de faire de l’ombre au spectre qui le poursuit et de sécuriser ainsi sa conscience en la mettant à l’abri de l’altérité. L’aveu de la polygamie a ici valeur de confession, de mea culpa. L’étiologie du fourvoiement dont il supporte le préjudice est lisible à travers un élément d’importance capitale : l’argent, le « pouvoir et l’argent  » comme le note l’auteur, nous dirons, pour appuyer son propos, le « pouvoir de l’argent. » L’argent qui donne les possessions, qui permet l’accès au bien-être, l’argent qui fait le bonheur finit par défaire l’homme. Du statut de maître, ce dernier passe commutativement à celui d’esclave faute d’une gestion rationalisée, humanisée du pouvoir. Or, qu’est-ce qu’un esclave, si ce n’est ce souffre-douleur, cette velléité de vie informe qui prend à son compte les tribulations du chef pour enfin mourir à sa place ? Mourir à la place du maître, telle est la rançon du serviteur, du mauvais serviteur à qui l’argent prend la tête et fait perdre le corps.
Quand arrive l' »heure de vérité » (chapitre 7) où il fait une sorte de bilan de sa vie conjugale avec sa femme, le « prisonnier » de Sidonie se rend compte du tort causé à sa compagne, fidèle et vertueuse. Réduite à l’impuissance face à la réalité, indéfectible, irrémédiable, celle-ci n’a pour traduire sa colère et sa déception que sa paire d’yeux pour pleurer :
« Quel hypocrite ! Quel inconscient ! Quel…
Les mots lui manquent. Elle respire bruyamment avant d’exploser. De nouveau.
– Comment a-t-il osé me faire ça à moi, la mère de ses propres enfants ? Que veulent-ils à la fin, ces hommes ?  »
À travers cet extrait, on voit s’épaissir la rancœur de la femme dont la docilité est mal rétribuée par un époux infidèle, corrompu par l’argent et la recherche des plaisirs artificiels, un mari dont l’argent a travesti la conscience et annihilé le sens des responsabilités. Le drame atteint son paroxysme avec la certitude établie dans la conscience de l’épouse d’être déjà contaminée, de porter à son tour « Elle », la terrible Sidonie, l’anonyme, l’irréductible ! Parce que Sidonie sait jouer à l’araignée qui enjambe les toiles l’une après l’autre, parce qu’elle est le Tarzan des cimes, elle sait fléchir, plier les branches auxquelles elle s’accroche et les maculer au passage de son funeste parfum aux essences nécrologiques. Elle enlace, ficelle, amarre ses captifs. La femme du cadre est surprise dans sa droiture par un sort qui la frappe par ricochet, du fait de son union « pour le meilleur et pour le pire » avec un « dandy » frivole. La formule sacramentelle tombe à face à son détriment.
A travers le sort qui la frappe se pose toute la question des origines sur les rapports au sein d’un couple où une partie, lésée dans son amour-propre par l’autre, remet en question l’éthique du code du mariage et les valeurs morales de l’honnêteté. La problématique qui s’en dégage conduit aux interrogations suivantes :
– Jusqu’où peut-on aller dans le don de soi pour plaire à l’autre ?
– Jusqu’à quelle extrémité doit-on s’aliéner, renoncer à soi pour autrui, cet autre qui n’est pas moi, qui n’est pas comme moi, qui est différent de moi ? L’autre dans lequel je dois me reconnaître, m’accomplir pour cesser d’être unique, pour échapper au drame de la distanciation différentielle, parce que le mal du temps qui est aussi celui de l’espace, disons tout simplement le mal de l’homme est toujours cette épreuve de l’unicité, de la solitude.
L’altérité ne sert plus de refuge. Elle n’est plus cet asile qui me protège contre les agressions et les « rêveries du promeneur solitaire » que représente l’homme esseulé, l’être en déréliction dont Rousseau décrit le triste profil. Elle est l’abîme qui me dévore, le précipice qui opacifie mon existence et me prouve que dans un couple, le dévouement au singulier, celui-là même qui ne reçoit pas en retour de l’autre la réciproque de sa totale expression, est vain et illusoire. Le don soi n’est plus à tout dire vrai qu’un aléa qui ne s’accommode guère de la confiance traduite par l’absence de contrôle. Alors, aimer, c’est peut-être contrôler quand on ne peut maîtriser l’autre, c’est finalement, disait V. Hugo, agir, poser un acte. Dans le cas de la femme, aimer c’est défier la fidélité. Si la femme n’avait confiance en son mari pour croire aveuglement à ses missions fictives, si elle n’entérinait d’emblée sans restriction l’urgence de ses prétendus dossiers à traiter nuitamment au bureau, si elle doutait un tant soit peu de la « bonne foi » de cet homme, le drame aurait été éludé, peut-être ! Avec elle, la fidélité, disons plutôt la docilité, se lit à l’envers non pas comme une qualité, mais une tare, un défaut qui se nomme naïveté, stupidité.
Du mythe à la construction du réel
La traçabilité du récit et les instances de la narration qui le ponctuent montrent que tout agit dans le texte. Les lieux, à l’instar des personnages, jouent à la fois le rôle d’actants et d’acteurs :
– Ils jouent le rôle d’actants parce qu’ils permettent l’enchaînement de l’histoire et servent de raccords aux embouts des péripéties. « Le Divorce » ne se conçoit mieux que lié au « Meeting Potes » ; la résidence somptueuse du jeune conseiller du ministre, son véhicule 4X4 et son « feeling » prestigieux n’ont de valeur qu’opposés à la misère de Sidonie, condamnée comme ses clients peu nantis, à éprouver la misère dans les « Mapanes « , les « Matitis. »
– Les lieux sont aussi acteurs en ce sens qu’ils participent à la composition de l’unité d’action. Les nuisances sonores du bar « Le Divorce » – qui égayent plutôt les clients – créent une ambiance carnavalesque favorable à la détente et, dans le cas du jeune cadre, aux conquêtes donjuanesques. A ces éléments s’ajoutent des détails dont la description vaut plus que l’action et le discours. On a, par exemple, l’habillement de la servante, ses allures festives, son regard provocant. L’auteur souligne : « La poitrine de la fille, professionnellement exhibée à ses yeux gourmands, l’empêche de réfléchir. Il est subjugué par le charme de cette fleur tropicale . »
Il est un pur truisme de rappeler encore que chacun des personnages est une figure symbolique. Le trio d’acteurs : la femme docile, le mari infidèle et Sidonie sont des prototypes de la société, notre société contemporaine qui montre autrement ceux que l’on croit bien connaître, des personnes qui ne sont pas toujours à l’image de ce qu’elles donnent à voir. Ici, toute la problématique se lit dans la difficulté qu’il y a à surmonter l’épreuve de la connaissance de l’autre. Connaître ? Le mot déjoue les significations qu’on lui prête. Le mot descend du latin cognoscere (avoir présent à l’esprit un objet réel ou vrai, concret ou abstrait), être capable de donner des détails sur quelqu’un ou quelque chose… Alors, peut-on connaître ? Peut-on connaître l’être humain ? La connaissance est-elle du domaine du possible ? L’homme est-il mesurable au compas de l’analyse au point d’entrer dans l’expérience du vécu de l’autre ?
Encore une fois de plus, à travers le jeune cadre, on se rend compte des limites de l’intelligence humaine. Connaître paraît bien plus fort que ses différentes significations, parce qu’à l’évidence, la plus rude des épreuves pour l’homme, incapable de se connaître soi-même, est de connaître l’autre. La connaissance ne serait-elle donc qu’une prétention ? Connaître, c’est accepter, sans le savoir, d’être quelque fois naïf. C’est se nier soi-même au profit de l’autre. C’est croire à sa vérité qui s’arrête là où commence celle de l’autre. C’est cette leçon qu’enseigne l’épouse du conseiller, trompée par son assurance, ses certitudes.
Ainsi qu’on le voit, rien dans l’œuvre ne tient du hasard. Et là où l’on croit l’identifier, le hasard joue un rôle qui lui dénie son sens fortuit. Le jeune cadre vient-il au bar « Le Divorce » par hasard ? S’éprend-il de Sidonie par hasard ? Et cette conjonction de hasards ne finirait-elle pas par aboutir à la loi d’un certain ordre, celui du déterminisme ? Et ce déterminisme joue dans la logique du récit, de sa confection à la taille des réalités décrites par Chantal Magalie. La géographie des univers fictionnels qu’elle construit souligne le caractère réfractaire, subversif de la maladie du Sida qui n’hésite pas à frapper jusqu’au sommet de la hiérarchie sociale. Elle n’est donc pas la « maladie des pauvres » comme semble le répandre une certaine opinion. Le Sida est un cyclone qui emporte indistinctement aussi bien le riche que le pauvre. La différence des statuts n’est ressentie en aval, c’est-à-dire dans le courant de la pathologie, qu’à travers l’aptitude du premier à se prendre en charge, contrairement au second condamné par la pauvreté à la mort certaine. Mais ici, Sidonie se passe des commodités financières. Dans sa rage, elle crucifie toute victime qu’elle croise sur ses multiples chemins. Le conseiller du ministre nous en donne le plus patent exemple.
Le sexe, chemin qui mène ce dernier à la fin des jours, se lit ici comme le plus grand mal de la société contemporaine. Le sexe avec ses travers, le libertinage, les jalousies, la libido insatisfaite, l’homosexualité, la pédophilie, la polygamie, les rancœurs, le fétichisme, toutes les perversités qui outragent la morale sociale, devient le vecteur de la souffrance de l’homme. Il nourrit toute une famille de vices qui prennent racine dans le « Quartier de noblesse » devenu, par de tels abus, le « quartier de bassesse. » La passion du sexe a perverti l’homme en l’arrachant aux vertus de la morale et au culte du civisme. Un haut fonctionnaire censé montrer l’exemple de la correction, de la discipline et du sens civique, censé servir aussi de modèle de vertu aux plus jeunes, se compromet dans la licence, la volupté. Du plaisir qu’il sait procurer lorsqu’on l’utilise à bon escient, le sexe fait passer au meurtre, au crime et devient un agent conscient de frustration culturelle et de démolition des vies.
La dictature de Sidonie et la grande épreuve du départ
Se préparer à mourir ? Voir venir la mort ? Préparer sa propre mort, la concocter, l’assaisonner comme pour un menu ? Tel un maçon alignant les briques d’un bâtiment ou un menuisier rabotant une planche, le conseiller du ministre va devoir tailler sur mesure le linceul de sa dépouille. L’épreuve n’est pas des moins rudes ! L’homme qui sent tout dépérir autour de lui est conscient d’avoir failli. Terriblement. Aussi, comme pour se racheter au-delà des aveux, prépare-t-il avec la plus grande minutie le « voyage » latent (chapitre 11). A son fils, il dicte le testament qui est son ultime volonté, son ultime parole, l’héritage qu’il entend laisser à la postérité :
 » Je vais partir…
Les deux enfants se regardent de nouveau. La fille garde le silence. Elle pense qu’il part comme d’habitude (…) C’est le petit frère qui questionne le père :
– Où ça, papa ? En mission ?
– Non… Non. Très loin. Je pars bientôt. Je veux que restiez bien sages tous les deux avec maman qui vous aime tant…
– (…) Et c’est elle qui te chasse ? (…)
– Non, votre maman n’y est pour rien. C’est moi qui me punis pour tout le mal que je vous ai fait.
– Non, papa, reste.
– Malheureusement, il est trop tard. Sidonie, elle, ne pardonne pas.
– Qui c’est, celle-là ?
– Une femme. Une autre femme. Celle avec qui j’ai désobéi à votre maman. Je n’ai plus les moyens de lui échapper. Je suis son otage . »
Le pathétique éclate à ce point du parcours et enlace l’émotion à partir de l’ordonnancement des préparatifs du voyage. Sous la pesanteur des épreuves, la tangente fléchit, puis décroît brutalement vers l’abîme du désespoir total. Préparer sa propre mort, voir s’approcher comme dans un rêve les limites de la vie est le drame à nul autre pareil qu’affronte le jeune cadre, victime de sa propre turpitude. Il y a dans son entretien avec son fils et sa fille, dans ses adieux, cette sorte de « dernière prière » quelque chose d’indicible, d’inexprimable qui dépasse le pouvoir des mots. C’est bien la charge émotive du destin. Ni le pardon des enfants, ni la repentance tardive du père ne suffisent plus à corriger le délit. La résignation stoïque, combative, est l’autre versant du dilemme à défaut de se fondre en jérémiades pathétiques.
Dans l’une et l’autre hypothèse le résultat reste invariable. La sentence est sans appel parce que la justice de Sidonie ne rend en dernier ressort qu’un seul jugement. Et parce qu’il exclut la médiation de la plaidoirie et ne prévoit aucune voie de recours, ce jugement reste irréversible. Elle, Sidonie, déteste la répétition. Une fois contractée, Elle emporte le client sur ses sentiers obscurs, ses chemins tortueux, ceux qu’elle trace en toute souveraineté et dont elle maîtrise les artères.
Aux chapitres 10 (L’appel) et 11 (Le voyage), Sidonie est à pied d’œuvre, s’active, s’arc-boute avec la dernière énergie pour déraciner l’arbre, le séparer de ses fruits et l’emporter enchaîné par les liens de la mort. Elle n’a pas le regard sur la tristesse des enfants qu’elle place sous la tutelle de l’orphelinat, c’est-à-dire sous la responsabilité du néant, puisque la mère contaminée elle aussi, finira par prendre la même trajectoire . Justement la force de Sidonie est dans la surdité, la cécité et l’insouciance.
Avec l’accent grave, le ton aigu du discours et la vivacité de la description qui sont caractéristiques de son style, Chantal Magalie restitue le pathétique de la courbe de toute une vie complètement vidée de sens par un acte d’un instant. C’est dire autrement que la vie, en elle-même, n’est que l’expression de cet instant qui proclame sa destruction. Regarder, voir se profiler sa propre mort, évaluer le coût de sa perte et le désarroi de la famille sont autant de drames insupportables que décline l’œuvre !
La première victime du désenchantement qui s’ensuit est à n’en point douter l’épouse. Elle se voit condamnée à devoir payer les frais de l’inconstance maritale dont le drame, porté au plus haut point, est l’intrusion de Sidonie dans le ménage. Cette Sidonie haïssable, perverse, paradoxale qui donne en même temps une chose et son contraire : le plaisir et la souffrance, la mort. Pour un plaisir que sa femme savait lui procurer, un plaisir qui, dirait-on, « chômait » chez lui, disponible et entier, l’homme crée une veuve et deux orphelins. Que veut-on finalement de la vie ? Que veut-on dans la vie ? Comment se frayer les voies qui mènent au bonheur, au vrai bonheur qui surpasse toutes les envies, qui tue toutes les convoitises ? Un bonheur paisible, réconfortant ? Comment se rendre compte que l’on est déjà heureux quand la vie suit encore son cours ? Le bonheur est-il véritablement du côté de la vie ? Comment, enfin, opposer à la pression que la fortune exerce sur le cœur de l’homme la résistance de la Raison et du bon sens ?
Autant de questions surréalistes qui suscitent des polémiques au sujet des farces et des détours du destin. Vouloir quêter ses bonheurs pour surpasser ceux que l’on a déjà inscrits à l’actif de son bilan est pour l’humaine espèce le signe originel de la déchéance. En lui-même il draine le chaos. La démolition du mythe des grandeurs débouche sur le Big-bang qui condamne à l’errance, celle du non être. Comme pour se libérer du chagrin, l’homme confesse ses torts. Il semble dès lors accepter le faix qui l’astreint à obéir sans condition au projet du départ. Partir ? Mais où ? Vers l’inconnu, vers cet ailleurs informe où le destin nous draine tous ! Partir pour ne plus jamais revenir. L’irréductible injonction est de Sidonie. Ne plus savoir ce qu’on veut, vouloir tout en même temps, ne vouloir que ce qu’on n’a pas, ne pas savoir vouloir, tel est le mal de l’existence. Et l’homme reconnaît en lui cette faiblesse des origines :
« – […] Je crois que l’homme est un chasseur né. C’est dans sa nature de multiplier les proies. C’est sa façon à lui de tester sa virilité, sa domination sur le sexe opposé. Malheureusement, il ne reconnaît pas souvent ses limites. La preuve … »
Tout le mal de l’homme est donc là, dans les conquêtes infinies, la recherche sans fin des bonheurs qui, une fois atteints, deviennent aussitôt insignifiants et ouvrent sur de nouvelles conquêtes. Ainsi de suite ! Sa vie est une spirale qui crée l’illusion d’une progression et laisse s’écrouler dès qu’on effleure le bout. Les hommes sont donc des Sisyphe qui s’ignorent, condamnés à l’effort toujours infructueux, sans cesse renouvelé. Sans cet effort stupide par lequel l’homme entretient ses mythes, celui de la grandeur en particulier, la vie n’aurait peut-être pas de sens.
Du coup, ce n’est plus tant ce départ même qui est l’objet de la tristesse du jeune cadre, ce n’est pas non plus la destination du terrible voyage, ce lieu mythique, angoissant qu’il ignore. C’est plutôt l’arrière, la terre de départ, le territoire de provenance sur lequel sa femme et ses enfants restent prisonniers du deuil. Conscient de ne plus compter parmi les siens, convaincu de l’irréversibilité de l’appel, il contresigne l’acte de sa démission imposée par l’intraitable maîtresse :
« – Tu viens maintenant ? demande Sidonie.
– Déjà ? Ne peux-tu pas encore attendre quelques mois ?
– Non !
– Quelques semaines ?
– Non !
– Quelques jours ?
– Non, non et non ! Quelques heures seulement. Nous ne pouvons pas rater le départ.
– Tu es inhumaine.
– De grâce ! N’abuse pas de ma patience. Dis au revoir à ta famille et partons. Nous avons suffisamment perdu de temps . »
Le malade n’a plus qu’à obéir à la voix incorruptible de Sidonie. L’hédonisme natif de l’homme toujours insatisfait, toujours conquérant, finit par rendre le bonheur qu’il recherche à la fois aléatoire et problématique : aléatoire parce que la réalité de son accomplissement devient de plus en plus improbable. Et problématique car une fois à portée de main, le bonheur se transforme en drame. Il défait l’homme qui le quête indéfiniment sans jamais parvenir à l’atteindre, à le saisir. Pour un cadre qui respirait tranquillement la prospérité et l’aisance, un tel sort est incontestablement douloureux.
Dans ce tableau de variation, les données du problème faussent la logique des écarts. Voilà un haut fonctionnaire hissé au piédestal de la pyramide sociale par son titre, ses possessions, qui descend de ses marches pour quémander dans la plèbe les joies que ses hauteurs ne lui procurent pas. Se pourrait-il que le bonheur ne soit pas à ces hauteurs où le commun des mortels situent pourtant sa demeure ? Ferait-il l’élève buissonnière aux élus du royaume des possessions ? Jouerait-il au cache-cache avec les riches, lui qui ignore les pauvres ? Renoncer, pour un temps, aux prestiges du sommet pour la base semble ruiner la thèse classique qui lie le bonheur à l’argent. Le préjudice de cette descente rappelle le viol des espaces de vie comme pour dire par des signes, des symboles, des allégories qu’à chaque classe ses territoires. Qu’y a-t-il de commun entre ce grand technocrate fortuné et une pauvre gérante vacillant dans les vallons des bars populaires ? Qu’y a-t-il de commun entre sa résidence luxueuse bardée de portail en fer et le taudis qui abrite Sidonie ? Pour montrer le décalage des niveaux de vie entre ces deux personnages, l’auteur écrit :
 » La jeune fille se détend malgré elle. Quel rêve d’habiter un endroit semblable ! Elle colle son nez à la vitre du 4X4 pour mieux profiter de l’air frais et de la vue. Des villas isolées se côtoient ou se font face, protégées par des clôtures fleuries. Un vrai coin de paradis ! Elle songe à sa minuscule chambre en planches qui n’accueille que son lit, sa housse à vêtements, son réchaud à gaz, son poste de radio et une énorme bassine d’eau. Au fait, a-t-elle eu le temps d’aller en puiser ce matin ? Comment fera-t-elle pour se laver demain ? Pourvu que la bassine ne soit pas déjà vide. Elle pousse un soupir. Quand pourra-t-elle enfin vivre comme ces gens qu’elle envie ? »
A priori, il n’y a guère de rapport entre eux. Il s’agit de deux styles de vie diamétralement opposés, de deux mondes asymétriques. La fille vit dans une pièce à double usage que l’auteur décrit comme suit :
« D’une part, elle (la pièce) permet de se débarbouiller en amont, dans un seau d’eau puisée à la pompe publique ou chez un voisin, moyennant un payement mensuel. D’autre part, elle sert de w.-c. en aval où un trou béant d’environ trois mètres a été creusé dans le sol à cet effet. Deux morceaux de bois traversent cette béance pour permettre d’y poser les pieds. Un seul coup d’œil, qui donne à voir des milliers d’asticots nageant dans les rejets humains, coupe l’appétit pour toute la journée . »
Comme on le constate, le conseiller du ministre et la gérante, bien que vivant dans un même pays – que l’auteur préfère ne pas nommer – n’ont pratiquement rien à se partager. On comprend dès lors la surprise que crée l’apparition du premier dans un bar populaire. Il y a dans le bas peuple quelque chose que les nantis ont bien du mal à fabriquer : c’est la spontanéité naturelle, cette absence de formalisme qui crée la gaieté et vicie la loi des rapports dominés par la préséance. Vivre en dehors des normes favorise l’euphorie, le défoulement dont l’absence chez les riches génère souvent le stress, l’amertume et l’angoisse. Il est bien connu que la règle tue. Les pauvres sont libres dans leur misère. Ils sont exempts des commodités et des convenances dont se préoccupent les riches. C’est peut-être ce laisser-aller, ce laisser-faire que ces derniers viennent rechercher dans les couches subalternes. On peut également penser à la volonté inavouée de domination. En d’autres termes, en convoitant une femme totalement démunie, le jeune cadre s’assure en retour une entière dévotion que ne lui témoignerait pas une femme de condition semblable. Son acte n’est pas forcément désintéressé.
Et lorsqu’elle se déploie dans l’homme, la luxure, la licence l’amène à bannir les limites et les frontières factices érigées entres les classes sociales. Ici, le pont est établi par la libido. Elle est la cause seule et vraie de ce récit à la limite du psychodrame. Le sexe attire, conquiert, apprivoise, réifie. Avec lui, tout dans la vie de l’homme bascule en un court laps de temps. Alors que Sidonie ne lui a pas encore révélé véritablement son identité, il se sent déjà comme arraché à l’affection de sa femme. La distance vis-à-vis de cette dernière, des enfants et de la résidence prend du relief devant l’envahissement de la conquérante, déterminée à l’extirper de toute relation extérieure. Il en est pourtant conscient, mais le parcours semble lui interdire le recul, encore moins le renoncement au plaisir irrésistible de Elle. Plus que la cigarette et le vin, le sexe apparaît être la plus irrésistible des drogues !
Jusqu’au chapitre 9 (Les adieux), l’aventure traverse des péripéties rocambolesques. De la dissimulation, l’époux passe à la plus difficile des épreuves : l’aveu. Il met son épouse dans la confidence de la situation (chapitre 3). Coupable et vaincu, il quête auprès des siens le soutien que nécessite son état. Il lui faut résister à la rage du spectre qui le martyrise (chapitre 4), puis faire l’expérience des redoutables tourments qui sont spécifiques aux victimes de Sidonie : remords, angoisses, ostracisme, réification, troubles au sein de la cellule familiale etc.
Mais parallèlement, ces étapes lui redonnent la foi et le courage de préparer son départ inéluctable et imminent. Le pathétique de cette ultime démarche volontariste se lit à travers l’entretien de l’homme avec sa fille et son fils, ses futurs orphelins qu’il rejoint dans une de leurs chambres :
« – (…) Je vais partir… (…)
– Où ça, papa ? En mission ?
Non… Non. Très loin. je pars bientôt. Je veux que vous restiez bien sages tous les deux, avec maman qui vous aime tant…
– Tu veux nous quitter pour de bon, papa ? Mais pourquoi ? Que… Que t’avons-nous fait ? demanda le petit garçon entre deux sanglots (…)
– Vous, rien ! Vous n’y êtes pour rien. C’est moi l’unique coupable. »
Les chapitres 10 (L’appel), 11 (Le voyage) et le dernier (Les retrouvailles) clôturent l’itinéraire douloureux de notre héros qui est, à la fin, rejoint pour la même cause, par son épouse.
Un roman à la saveur d’un journal intime
De par le sujet qu’il aborde et le profil des personnages en action, le roman apparaît comme une sorte de « journal intime. » L’intimité part du caractère tabou de la maladie qui touche au sexe dans une société traditionnelle qui en fait un sujet quasi interdit, puis s’étend sur le parcours des protagonistes.
D’abord, le conseiller rumine des chagrins qui le conduisent au bar. Rongé par le désespoir et la tristesse, il semble en querelle avec lui-même et vit un drame intérieur.
Ensuite, au bar « Le Divorce », une certaine Sidonie luttant contre la précarité, la misère, se satisfait de la présence de cet homme. En lui elle voit la réponse à ses problèmes. Elle espère ainsi sortir de sa situation de manque pour vivre un peu comme les autres, aisément. Puis, vivant le drame des absences répétées de son homme, la femme du conseiller est au cœur des querelles intimes. Quand elle apprend la nouvelle de Sidonie entrée dans sa vie de couple, elle pique une crise qui la conduit vers ses intimes pour leur confier le secret. Au moins, prouve-t-elle par là qu’elle est capable de fugues et c’est la moindre chose !
Enfin, et c’est là la plus grande intimité, cette voix intérieure qui martyrise l’homme, qui le harcèle, le somme de partir. Cette voix inconnue qui sourd des profondeurs du malade fonde tout le drame de l’œuvre. Sidonie n’est pas un personnage en tant que tel, identifiable sur une aire d’action particulière dans le récit. Son nom Elle représente la voix de la conscience, du remords, de la culpabilité qui, du tréfonds de son être, surgit pour rappeler au conseiller le sort qui l’attend. La fameuse Elle est donc la jumelle de Sidonie, la voix que la gérante a laissée sourdre dans sa victime. Au chapitre 10 déjà évoqué, c’est cette voix intérieure qui parle à l’homme. Désormais installée en lui Sidonie n’arrête pas de susciter des interrogations :
« – Mais qui est cette mystérieuse Sidonie, dont onn parle tant et qui porte la responsabilité d’une rupture familiale ? intervient pour la première fois T.A.
– Chaque femme est Sidonie, tant qu’elle n’est pas tienne, répond encore la meilleure amie de l’épouse éplorée.
– Tu veux dire que c’est un pseudonyme ?
– Oui et non. Sidonie existe réellement. Elle emprunte plusieurs visages. Mais comme tu ne sais pas qui elle peut être a priori, il vaut mieux être prudent.
– C’est un fantôme, mon Dieu ! Il paraît qu’on en voit au bord de mer et dans certaines boîtes de nuit ici. De vraies sirènes. Elles séduisent les hommes. Si l’un d’eux a le malheur d’être sous leur charme, il se réveille généralement le lendemain au cimetière . »
On constate, à travers ces extrapolations, que Sidonie reste toujours énigmatique. En dépit des ravages qu’elle fait elle demeure la plus grande inconnue. Omniprésente dans le texte, elle y est aussi absente. C’est sans doute ce trait de caractère indéfini qui scelle son énigme. On croit la voir partout. On la ressent partout mais personne ne la croise. Personne ne la connaît. Elle n’est pas les sirènes dont on parle tant, mais en même temps on peut la rencontrer n’importe où, de façon inattendue. Et même après la mort de l’homme, Sidonie continue d’alimenter les conversations, suscite des polémiques parmi les vivants sans que personne soit de force à définir ses contours, sa silhouette :
« […] On le voyait jamais. Nous avions fini par croire que c’était une invention de sa part. pour nous mystifier ou pour nous dégoûter des femmes […] »
Sidonie est donc un mystère ! Parce qu’elle lui rappelle les limites de la vie qui s’amenuisent à chaque instant, la mort latente qui avance à pas d’autruche, Elle (Sidonie) est le sujet de ses récriminations, de ses angoisses, de ses peurs. Cette querelle intérieure du héros fait du roman une œuvre éminemment psychologique.
Il importe de souligner aussi le débat sur la condition de la femme africaine, son statut social, les traitements inégalitaires et les sévisses dont elle fait l’objet évoqué par l’auteur. Des thèmes classiques déjà abordés par nombre d’auteurs africains comme Seydou Badian reviennent dans Sidonie. L’actualité de la question telle que la pose l’écrivain réside dans l’approche des réponses aux interrogations sur la psychologie des hommes. On peut établir un certain rapport épistémologique et critique entre Sidonie et Une si longue lettre de Mariama Ba principalement au niveau de la trame psychologique et des débats construits autour de la femme.
L’épouse du conseiller se retrouve comme Ramatoulaye, veuve et mère de deux enfants. Comme cette dernière faisant part de ses malheurs à sa meilleure amie Aïssatou Ba exilée aux Etats-Unis, la veuve du cadre se confie aux siens, à ses proches, surtout à sa mère. Mais de celle-ci elle ne reçoit en retour, pour toutes réponses, que des conseils d’encouragement. Son devoir à travers cette épreuve, lui dit-elle, est de prouver l’amour qu’elle a eu pour son mari. Pas plus que sa mère, Aïssatou Ba n’en fait pas mieux, elle que la distance tient bien loin de Ramatoulaye. Les deux intrigues se recoupent sur un même point qui sert de conclusion à toutes les discussions sur la femme africaine : agir. C’est dans l’action, l’engagement de la femme elle-même que réside la solution à ses propres difficultés. L’épouse du conseiller, tout comme Ramatoulaye, doit assumer son histoire, qu’elle l’ait voulue ou non !
Toute autre est la poétique du discours marquée dans sa singularité par des séquences lyriques . Ce passage itératif de la prose au lyrisme, montre au-delà même de la polyvalence de l’écrivain, la fonction littéraire de la poésie comme genre ayant pour vocation de servir la cause de l’expressivité et de la mélancolie.
La poésie scandée ou simplement dite est évocation de quelque chose de profond à soi, d’intime. Elle est à la fois dans l’émotion et la réaction, dans la douceur et la violence des sentiments, dans la soumission et la révolte. Chantal Magalie recourt à ce moyen d’expression littéraire qui rapproche le drame du récit à la nature du mal qu’il décrit : le sida. Sa révélation suscite le désarroi, la peur, les larmes. Il n’y a plus que des mots pour dire le malheur et les tortures de l’âme. La poésie se prête bien à la défense des intérêts d’un corps blessé, habité par une âme fugitive, évanescente.
Conclusion
En somme, Sidonie est une œuvre qui interpelle à la fois l’anthropologue et le psychanalyste. L’anthropologue se prêterait à la lecture des caractères des personnages et de leurs profils psychologiques en liant les résultats de ses enquêtes aux différentes unités de temps, d’espace et d’intérêt auxquels ils correspondent. Le psychanalyste étudierait la nature et la source des rapports conflictuels des acteurs en les opposant à eux-mêmes et à l’environnement dans lequel ils évoluent. Surtout il s’aviserait de comprendre la place de l’homme, sa fragilité, dans l’aventure de la vie.
Sidonie interpelle aussi la morale au regard des considérations et des mythes construits sur la question de la sexualité et des problématiques qui s’y rapportent dans une société africaine à cheval entre tradition et modernité. C’est un récit dont l’allure scénographique prédispose à une adaptation cinématographique. Peut-être, s’ajoutant ainsi aux nombreux autres films pédagogiques sur le Sida, l’œuvre contribuerait triplement par le son et l’image à la prévention contre l’un des plus grands fléaux des derniers siècles.
Le seul bémol à relever est, peut-être la gêne que représente cette balade du lecteur entre le récit en prose qui suit une certaine linéarité et les textes poétiques qui, chaque fois convoquent un autre ordre de réflexion. Une telle gymnastique cérébrale peut porter le danger des coupures à l’intérieur d’un récit. Comme nous l’avons relevé déjà plus haut, ce doux mélange témoigne de la polyvalence de l’écrivain. Et c’est peut-être à ce syncrétisme littéraire que l’œuvre doit sa saveur.

Quelques pistes de lecture
Sur le roman gabonais :
– Mbazo’o Kassa (C.-M.) Sidonie, Paris, Alpha-Oméga ; 2001.
– Mbazo’o Kassa (C.-M.) Fam, Maison Gabonaise du Livre, 2003
– Mintsa (J), Un seul tournant Makôsu, Paris, La Pensée Universelle, 1994
– Mintsa (J), Histoire d’Awu, Paris, Gallimard, 2000
– Ndong Mbeng (H. F) Les Matitis, Sépia-Poche, Sogapresse Gabon, 1992
– Ntsame (S), La fille du Komo, Paris, L’Harmattan, 2005
– Ntyugwétondo Rawiri (A), Elonga, Paris, Editaf, 1980 (édition Silex, 1986)
– Ntyugwétondo Rawiri, (A), Fureurs et cris de femme, Paris, L’Harmattan, 1989.
Sur le roman africain :
– Ba (M), Une si longue lettre, Paris, NEA, 1979
– Badian (S), Sous l’orage, Paris, Presses Universelles, 1957
– Beyala (C), C’est le soleil qui m’a brûlée, Paris, Ed. J’ai Lu, 1987
Sur le roman français :
– Baudelaire (C), Les Fleurs du mal, 1857
– Malraux, La condition humaine, 1933
– Sartre (J. P.), La P… respectueuse, 1946///Article N° : 4348

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