« Elf, la pompe Afrique »

Raconté par son auteur

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De fin mars à début juillet 2003 s’est déroulé en public au Palais de Justice de Paris le procès intenté par la compagnie pétrolière Elf à trente-sept prévenus dont MM. Loïk Le Floch-Prigent, Alfred Sirven et André Tarallo. Ce qui était officiellement jugé : les abus de biens sociaux commis au détriment de la compagnie pétrolière, de 1989 à 1993. On entrevoyait aussi le Pouvoir politique comparaître devant la Justice. Même si ses représentants officiels étaient absents, l’État français devait y répondre de son fonctionnement, de ses financements, d’une façon de diriger sa politique. Dans le procès Elf, ce sont les pays d’Afrique qui, en filigrane, se révélaient au fil des audiences comme un « moyen » au service de la République. Cette entreprise s’est révélée être le bras séculier d’enjeux opaques, occultes, au service d’une « certaine idée de la France ». Au mépris des peuples africains. Avec le média que peut être le théâtre, je présente actuellement ce spectacle, que je joue le plus souvent à l’invitation de nombreuses associations dans toute la France. Pour l’écrire, j’ai assisté aux quatre mois du procès. Les dialogues sont bien les propos qu’ont tenu les protagonistes du procès. Peu à peu, derrière le procès fait aux hommes, un autre procès apparaît, celui d’un système, celui d’un État. Procès qui n’a pas eu lieu. Il me semble que les problèmes entre les villes et leurs banlieues recoupent ceux de la métropole et de ses ex-colonies. L’expérience de ce glissement est à l’origine du projet Elf, la pompe Afrique. J’ai travaillé auprès de Sylvie Gravagna au sein de la Compagnie Charlie Noé pendant plus de 10 ans dans ces banlieues, ces zones « sensibles » (habitées par des personnes dotées d’une grande sensibilité, selon le metteur en scène Jacques Livchine). Nous y avons créé et tourné des spectacles. Comme par exemple un long et beau travail sur la mémoire de l’immigration à Pantin. Nous y avons fait l’expérience de l’abandon du politique. La scène, la parole, le jeu, me semblent plus efficaces que les karchers et autres couvre-feux issus de je-ne-sais quel cerveau de ministre encore coiffés de casque colonial.

Elf, la pompe Afrique, théâtre de la Fenêtre, 77 rue de Charonne, 75011 Paris.
Jusqu’au 18 décembre.///Article N° : 4104

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