Une rencontre électrique

Entretien de Samy Nja Kwa avec Mamani Keita et Marc Minelli

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Vous sortez un premier album en commun, que vous êtes-vous apportés ?
Marc Minelli : J’ai d’abord découvert une voix, puis plein de choses que je connaissais pas sur la musique africaine, parce que pour moi cette musique se limitait à Fela et King Sunny Adé. Je me suis donc aperçu qu’il y avait d’autres sentiments, une musique très riche.
Mamani Keita : De mon côté, c’est surtout sa façon de travailler, qui est très occidentale, et surtout les mélanges qu’il a fait dans ma musique.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Marc Minelli : Je travaillais aux éditions chez Universal. Le manager d’Amadou et Mariam m’a fait écouter un enregistrement sur DAT de la musique de Mamani. J’ai rentré tout ça dans l’ordinateur et assez facilement, les compositions sont nées. Puis je l’ai rencontré, et je me suis senti très vite à l’aise dans sa musique.
Travailler avec un ordinateur, est-ce que ça change la manière de concevoir la musique ?
Mamani Keita : Non, pour ma part ça ne change pas ma façon de voir les choses, je me suis adaptée à ce travail sur l’ordinateur. Par contre, le jour où nous avons commencé à travailler ensemble, je crois que j’ai changé ma façon de chanter, ce que je considère comme un plus !
Marc, est-ce que dans ton travail, tu t’es adapté à la musique africaine ?
Lorsqu’on fait des arrangements sur ordinateur, le but n’est pas de transformer, mais de révéler plutôt des choses déjà présentes dans la musique. J’ai appréhendé ce projet avec beaucoup de respect, parce que, je me répète, c’était une musique que je connaissais pas. En écoutant les bandes de musiques traditionnelles, j’ai beaucoup appris. Ensuite, j’ai transformé l’ensemble à ma manière tout en respectant le fait qu’il y a une chanteuse ainsi que des chansons.
Quel était le fil conducteur de ce projet ?
Marc Minelli : C’était la voix. Sur ordinateur, une fois qu’on a la voix, on peut transformer le tempo, on peut faire beaucoup de choses, on peut remixer une valse par exemple sur une voix africaine. On peut tout faire dans une certaine mesure et dans un certain respect.
Quel est ton instrument de base ?
Au départ, j’ai essayé de jouer de la batterie, et du coup mes parents m’ont inscrit au conservatoire. Rentré chez moi, je mettais des disques à fond et tapais sur des cartons de lessive et finalement, j’ai appris la batterie comme ça. Ensuite j’ai joué de la guitare, je suis aussi chanteur.
Ce qui n’explique pas que tu te sois tourné vers la musique électronique.
J’ai commencé à la pratiquer ver 1988. A l’époque, mon groupe n’avait pas les moyens d’aller dans un studio. On avait acheté un ordinateur Atari, qui ne coûtait pas cher, et permettait quasiment de faire un album chez soi avec très peu d’argent. J’ai persisté jusqu’à me servir d’un ordinateur comme d’une guitare électrique.
Mamani, comment était-ce d’être une femme et faire de la musique au Mali ?
Au départ, ma mère ne voulais pas que je devienne chanteuse. Ma grand-mère, dont je porte le nom et avec laquelle je vivais, chantait et je l’accompagnais là où elle jouait. Et j’ai appris à chanteur grâce à elle dès l’âge de 13 ans. Après son décès, ma mère m’a interdit de chanter, prétextant que je n’étais pas griotte. Un jour, en son absence, je suis aller jouer avec des amis de mon quartier. A son retour, elle l’a appris mais mon frère lui a fait comprendre que je voulais devenir chanteuse.
Marc, t’es-tu imprégné de la culture de Mamani ?
En fait, je suis allé au Mali après l’enregistrement de l’album. J’ai pris l’avion le lendemain du dernier remix. J’avais une vision rêvée de l’Afrique, mais j’ai eu de bonnes surprises. Quand je vais dans un pays, je vis avec les gens et me comporte comme si j’y habitais. J’ai rencontré la petite famille de Mamani…

///Article N° : 2087

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