Terakaft : un son brut qui roule

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Une bande-son inespérée pour toute personne désirant s’engouffrer en pays touareg. Si possible, éviter ce lointain fantasme de l’homme bleu se noyant dans son turban. Terakaft n’est pas une rêverie lentement susurrée à l’oreille des amateurs de grand voyage sous tempête de sable.

Terakaft est un concentré de mélodies asuf et ishumar* portant haut ses héritages séculaires, s’abreuvant aux embouchures d’un fleuve imaginaire, où se retrouvent le blues, le rock et du psychédélisme, sous l’influence par moments, brève et ingénieuse, d’un certain fantôme Hendrix. Des guitares électriques, deux rythmiques et une basse, flirtant avec les rythmes d’une calebasse ou d’un djembe, évoquant l’exil, les sécheresses et les tensions militaires. Riffs syncopés, clappements de mains et jeu d’appels-réponses au chant. Un son fiévreux, compact et sec à la fois, composé sans fioritures et bien enraciné dans le sable chaud de la vastitude saharienne. Sur l’un de leurs titres phares, on entend courir cette idée : « la vérité que vous aimez/ je la vois comme des arbres/ dont les racines cherchent l’eau. »
Le groupe a été fondé à Kidal au Mali en 2001 par Sanou Ag Ahmed, son frère Abdallah et « Khiwaj » Kedhou Ag Ossad, un ancien du Tinariwen d’Ibrahim « Abaraybone » Ag Alhabib. Rejoint par le brillant « Diara » Liya ag Ablil, un autre compagnon de Tinariwen, en 2006, Terakaft enregistra son premier projet au Studio Bogolan au Mali, en 2007. L’horlogerie ne s’est, pour ainsi dire, plus arrêtée depuis, avec une réputation qui est allée grandissante, dans la grande famille des musiques du monde. Kedhou Ag Ossag est certes retourné au désert, mais Mathieu Vaguenez, un musicien d’Akekoi, a rejoint l’équipe aux perçus pour un groove d’une efficacité rare. Le groupe donne ainsi l’impression de fonctionner selon la sainte loi de la géométrie variable. Avec des apparitions nées de rencontres fulgurantes, telle la présence à ses côtés des fous de la tribu Lo’Jo.
Concocté dans leur terroir angevin, aux côtés de Jean-louis Levenais, membre du collectif Akekoi, Kel Tamasheq, le dernier opus de Terakaft, a été enregistré sous la houlette de Justin Adams, un habitué des sons du désert, complice affiché de Robert Plant et de Juldeh Camara, déjà réalisateur de deux galettes du Tinariwen. Kel Tamasheq raconte le destin d’un peuple suspendu au vide par des politiques demeurant indifférentes à son sort, au mépris des droits humains les plus élémentaires. Aratan n Azawad, le précédent, exaltait déjà cet esprit rebelle, résistant à la déconfiture annoncée. Ce dernier opus ne fait donc que confirmer qu’après quatre albums, Terakaft reste bien fidèle à sa conviction initiale, à savoir défendre un destin, celui de son peuple.

*Asuf pour la nostalgie et ishumar en référence aux Touaregs déracinés, éparpillés sur leur territoire d’existence et survivant grâce aux petits boulots.Ishumar vaut pour chômeur. L’album Kel Tamasheq de Terakaft est sorti chez World Village / Harmonia Mundi en 2012. Terakaft est en tournée actuellement : le 10 avril 2013 au Cargo à Londres, le 11 avril au Magic Mirrors du Chorus des Hauts de Seine à Paris La défense, Le 24 avril au Printemps de Bourges, le 6 juin à la Villa Medicis à Rome, le 26 juin à nouveau à Paris, à la Bellevilloise. Plus d’infos : http://www.myspace.com/terakaft///Article N° : 11441

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