« Studio 105 » de Mayra Andrade

Souvenir d'une fille de lune

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Ne plus savoir quoi écrire, ni quoi dire. Après une rencontre troublante avec la plus prometteuse des filles de lune à Paris. Une jeune cap-verdienne encore marquée par une enfance belle comme la nuit, qui rendit un jour un vibrant hommage à l’astre luisant, en lui dédiant une chanson, Lua, sur son premier album, Navega, sorti en 2006. Elle se prénomme Mayra. Elle est gracieuse, étrangement sûre d’elle, sans excès. Elle sait où elle va, parle merveilleusement bien, connaît ses classiques. Exigeante, inspirée, petite fée mature avant l’âge, elle a quasi-tout d’une grande. Ce qui explique qu’elle rayonne autant sur les plateaux, en portant le flambeau de toute une génération, à travers laquelle on retrouve aussi les voix de Lura, Tcheka ou Sara Tavarez.
Fille de diplomate, très tôt tombée dans la marmite du son, elle est née à La Havane et ne s’installe à Paris qu’après avoir pas mal bourlingué, au rythme d’une diaspora sans cesse portée par la nostalgie du pays manqué. C’était en 2002. Une vie en musique dans la capitale de la sono mondiale ne pouvait être que promesse d’avenir pour une jeune et talentueuse artiste à l’ancrage sûr. De vivre au Sénégal, en Allemagne, en Angola ou à Cuba n’aura fait que renforcer sa conviction d’appartenir à ce fameux « petit pays », devenu fantasme postmoderne pour les fans de Cesaria Evora. Batuque, funana, morna et autres coladeira accompagneront dès lors cette jeune damoiselle au sourire circonspect, qui passe pour être la relève possible de la diva aux pieds nus, partout où elle mène son tour de chant. Ajoutons aussi qu’elle est plus que d’autres, sur cette scène capverdienne, à l’écoute des musiques de ce monde globalisé.
Mayra Andrade, 27 ans à peine, est fille d’une terre. Mais elle sait aussi se laisser porter par le souffle de l’ailleurs en son répertoire riche et ouvert, notamment lorsqu’elle s’engage vaillamment aux côtés d’un trio de complices surdoués. Munir Hossn aux arrangements, guitare, cavaquinho, Zé Luis Nascimento aux percussions et Rafael Paseiro à la contrebasse l’ont ainsi rejoint à Radio France, en septembre dernier, pour une live session mémorable. Un temps de rencontre pour un troisième opus, au titre sans mystère pour les habitués parisiens de la Maison de la radio (Studio 105), où s’est effectué l’enregistrement. Avec deux invités de marque au plateau : Hugh Coltman au chant pour le titre Odjus Fitchadu et Vincent Segal au cello. Il en est sorti un petit collector, qui résonne à la fois comme l’épilogue d’un chapitre de vie et comme l’annonce d’une nouvelle quête à instruire, savamment. Une joute musicale, en réalité. Onze titres servis sur un plateau de l’entre-deux monde. Mayra Andrade en profite pour interroger son répertoire connu sous une lueur intimiste.
On y retrouve la valeur d’une promesse tenue. On y entend surtout le désir de transcender ce qui a pu se dire dans ses précédents albums. De l’amour, de l’épure et de l’audace. Un opus généreux, résolument inscrit entre le registre d’un instant (le live) et le besoin de surprendre (un questionnement) l’oreille endormie. « C’est avec cette formule que j’ai envie de tourner cette année » explique tranquillement celle qui se définit avant tout comme une artiste de scène. « J’y fais le point sur ce que j’ai pu écrire par le passé, tout en cheminant vers autre chose ». Le live du Studio 105 reste « organico » et, surtout, reste digne, dans le rôle de l’album qui boucle un cycle. Avec une mention spéciale, figurant sur trois titres, en hommage à la singularité d’Orlando Panthera. Un compositeur distingué, mort à 33 ans, avant d’avoir pu éclore hors de sa bulle cap-verdienne. Façon de rappeler que Mayra Andrade n’oublie pas ceux qui la maintiennent en vie. Panthera était ce qu’on appelle un génie en musique. Ce qui renforce le mythe de l’hommage rendu – éternellement – aux astres qui brillent par les filles de lua

Plus d’infos sur sa tournée 2011-12, sur son site : http://www.mayra-andrade.com/fr-concerts.html///Article N° : 10201

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