Un homme en colère

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Dans Africanisme : la crise d’une illusion, récemment paru chez l’Harmattan, Didier Gondola règle son compte à l’africanisme français. Analyse et réflexions de Catherine Coquery-Vidrovitch, « historienne de l’Afrique ».

Il faut prendre l’ouvrage de Didier Gondola pour ce qu’il est : le cri d’un homme en colère. Cette colère, globalement légitime, ne doit pas inciter en retour la critique (française) à se focaliser sur les maladresses. On peut, au contraire, accepter le jeu, et être sensible à la vivacité du trait, non dénué d’humour, mais aussi de méchanceté enlevée : par exemple quand il décrit sans pitié l’évolution à la fois physique (ventrue) et mentale (arrondie) de l’africaniste-type, ou le discours « débraillé, indigent, à la limite de la perversité » du sociologue indifférent à la chronologie. L’expression est souvent agressive, mais aussi joyeuse. En rester là reviendrait à négliger d’examiner le fonds du propos, à savoir le bien-fondé du procès intenté à l' »africanisme » français. L’ouvrage va d’évidence faire grincer des dents beaucoup de chercheurs dits « africanistes » (je préfère pour ma part, comme le souligne l’auteur au passage, me qualifier d’ « historienne de l’Afrique », afin de récuser l’idée baroque mais encore parfois soutenue que l’ « africanisme » serait une discipline, ce concept étant apparemment utilisé comme synonyme d’ « anthropologie africaine » (1)). Car Didier attaque à la serpe, ce qui l’incite à des généralisations non dépourvues d’erreurs que je ne m’amuserai pas à écheniller, ce n’est pas à mon avis le problème. Le problème, on pourrait le définir à la façon de Gérard Noiriel : l’incapacité généralisée, y compris chez les intellectuels, à savoir « se déprendre de soi-même pour épouser le point de vue des autres (2) », d’autant que « le besoin de se rehausser en dévalorisant les autres est un trait universel de la nature sociale de l’homme (3) ». Quelle attitude prendre devant ce constat au demeurant pessimiste que je partage ? Didier choisit la posture de l’intellectuel critique « chargé de dire la vérité au pouvoir au nom des opprimés (4) ». Il s’installe donc dans le refus et la dénonciation de pouvoir ; il attaque avec autant de brio que de férocité les africanistes, qu’il qualifie en somme globalement d’ « intellectuels de gouvernement  » pour continuer de reprendre les expressions de Noiriel (5). Notons que Noiriel stipule que ce qualificatif n’entend pas être péjoratif sous sa plume : il désigne les intellectuels qui reprennent les problèmes tels qu’ils sont posés par les professionnels de la politique pour y répondre avec leurs compétences universitaires, donc renoncent peu ou prou à leur originalité de pensée. C’est exactement ce que Gondola reproche aux « africanistes ». Il leur, il nous reproche l’ethnocentrisme d’une élite intellectuelle qui ne se remettrait jamais en question. Je vais tâcher de me modeler sur Noiriel, me reconnaissant la même « manie du doute » que lui (6), pour adopter la position difficile du « go-between « , celui de l’ « intellectuel spécifique  » : qui revendique non pas d’être au-dessus de la mêlée, cela n’existe pas, mais la capacité d’être un peu lucide sur soi-même, en allant précisément au-delà du réflexe spontané qui consiste à se mettre entre parenthèses (7).
La crise de l’africanisme occidental
Ceci dit, à une certaine échelle généralisante, on peut « créer » une « corporation africaniste » française englobante. Cela fait quand même fi de distorsions, voire de fractures internes profondes au sein de la profession, pour la plupart relevant de positions politiques contrastées, voire opposées face aux pays du Sud. Mais, quels que soient les désaccords (je suis loin d’approuver tout ce qu’il écrit), il faut écouter cette voix de l’extérieur, issue d’un universitaire aujourd’hui congolo-américain, mais formé de l’âge de 10 ans à 30 ans à l’école française de France. Il sait donc de quoi il parle. Il a souvent raison, par exemple quand il souligne les faiblesses de la thèse de 3° cycle qui a pu voir se côtoyer d’excellents travaux et d’autres plus que douteux (faiblesses en partie seulement corrigées par la thèse dite « nouvelle » analogue au Ph.D.) (p. 199-200), ou l’exiguïté ridicule des connaissances extra-européennes pour ne pas dire extra-françaises des historiens français (pp. 207 sq.). Il a aussi raison d’affirmer que Jean-Pierre Cot fut le meilleur ministre de la Coopération que la France ait jamais eu – mais a malheureusement si peu su garder – (sans doute cela aurait-il pu l’inciter à juger un peu moins sévèrement les « africanistes de gauche » de l’époque qui ont effectivement cru, un bref moment, qu’il n’était pas indigne de jouer aux « intellectuels de gouvernement » en collaborant avec le premier Mitterrand…). Bref, estimant que le « déphasage entre l’africanisme en France et la pensée intellectuelle proprement africaine » est total (p. 105) – ce qui est un brin exagéré mais globalement pas faux -, son plaidoyer vise à « rendre l’histoire à ses acteurs » (chapitre 10), revendication plus que légitime. Je reprendrai à ce propos plus brièvement mon opinion sur la question, plus nuancée que celle de l’auteur (ce qui est normal puisque j’ai vécu les choses « de l’intérieur »), telle que je l’écrivais déjà dans le Débat il y a cinq ans à la suite de longues conversations échangées sur internet avec lui (8). C’était après que nous ayons essayé de réaliser ensemble un ouvrage de dialogue impétueux dont mes collègues, épouvantés par la virulence de son franc-parler, ont rapidement bloqué l’idée.
Pourtant, Didier Gondola a raison sur un point central : l’ « africanisme » occidental est entré en crise, ayant souvent du mal à prendre le tournant d’un héritage pétri de culture coloniale et postcoloniale. On a déjà fait le procès de l’orientalisme (9), ou de l’américanisme. Pourquoi pas de l’africanisme, dont on ne comprend plus trop pourquoi tant de chercheurs continuent à défendre la légitimité ? Ce sont des courants qui sont nés de la science coloniale, avec ses mauvais côtés : science, certes, et même érudition de qualité, mais connotée par son temps, dans le contexte des théories racistes pseudo-scientifiques de la fin du XIXè et de la première moitié du XXè siècle. C’est ce que le philosophe congolais Valentin Mudimbe a qualifié de « bibliothèque coloniale » (10), qui a meublé et continue largement de meubler les esprits, ceux des Occidentaux comme ceux des Africains qu’ils ont contribué à former.
Non qu’il soit défendu de s’intéresser à l’Afrique quand on n’est pas Africain, ce serait absurde (Didier n’est pas clair sur ce point). Est là pour le rappeler le fameux exemple (qu’il cite et commente) de l’historien américain Robert Paxton produisant en 1972, vingt ans avant les historiens français qui n’osaient pas le faire, la première étude sur le régime de Vichy : ou, plus récemment, le cas de l’historien Herman Lebovics se lançant, avant les Français, dans l’analyse de l’imaginaire colonial comme partie intégrante de la France (11). Le regard « extérieur » a du bon. Mais ce ne sont pas les « africanistes » qui ont à décider de ce que sont ou doivent vouloir les Africains, même si la communauté scientifique internationale, Africains compris, ne peut que déplorer la situation trop souvent sinistrée de la science en Afrique. Ces contraintes culturelles évidentes (pauvreté des bibliothèques, misère de manuels trop souvent « ringards » hérités des anciennes métropoles, pressions sociales prégnantes…) ont aussi leurs mauvais côtés, et il ne faut pas non plus se leurrer : n’en déplaise à Didier Gondola, il existe probablement, en France comme en Afrique, au moins autant d’ « extrémistes afrocentristes » limités par des connaissances lacunaires que d’africanistes bornés enfermés dans leurs préjugés, et ce ne sont malheureusement pas toujours les meilleurs qui tiennent dans leurs bastions respectifs le haut du pavé… Mais les méfaits des uns ne justifient en rien l’insuffisance des autres. Je laisse donc cette question de côté : des chercheurs médiocres existent dans tous les pays du monde, en Afrique ni plus ni moins qu’ailleurs.
Ce qui est important, en revanche, c’est que dorénavant la très grande majorité des chercheurs en sciences sociales africaines est formée en Afrique par des chercheurs africains. Ceux-ci ont désormais la volonté concertée (par exemple au sein de l’Association des Historiens africains ou dans le volume collectif annoncé par l’historienne malienne Adame Ba Konare en réponse aux âneries émises à Dakar par Sarkozy) annoncée par Didier Gondola : celle de construire un corpus autocentré et autogéré de savoir sur l’Afrique. Cette évidence semble bien ignorée de ce côté-ci du monde.
Des historiens africains peu intégrés à l’université française
Pour ce qui est de l’université française, Didier décrit la situation telle qu’il en a gardé le souvenir à son départ, il y a quinze ans. Le fait est qu’on décèle peu de changement depuis lors, en tous les cas en Histoire, sa discipline (et la mienne), alors que l’on a vu ailleurs recruter quelques unités de sociologues ou autres scientifiques « africains », qu’ils soient issus du continent ou… des banlieues. Pour en comprendre les raisons, il faut encore une fois recourir à l’héritage. Le drame est que l’infrastructure universitaire francophone fut inexistante jusqu’à la fin des années 1950, ce qui accentua encore les malentendus. Tout docteur africain en histoire ne pouvait le devenir qu’en France, et ce jusqu’au milieu des années 1970, quand les Sénégalais imposèrent (ce en quoi ils eurent bien raison) une formation doctorale à l’université de Dakar, bien qu’ils n’eussent pas encore en poste de docteur d’État africain (titulaire de la thèse française faut-il le préciser). En France, les étudiants africains – comme les autres étrangers – n’en étaient pas pour autant sur le même plan que leurs camarades français : il fallut à quelques individus un courage peu commun, en sus de moyens financiers particuliers, pour préparer les fameux concours (ENS ou Agrégation) qui ne leur donnaient ni le droit de toucher un salaire, ni encore moins de devenir fonctionnaire (cette possibilité est récente pour les universitaires étrangers). Jusqu’à il y a une vingtaine d’années, ils étaient, sauf en cas de naturalisation, légalement inassimilables dans la fonction publique enseignante ; il était quasi impossible pour un étranger d’être intégré à l’université française. Ce fut le cas pour Didier Gondola comme pour beaucoup d’autres. Didier Gondola consacre un nombre important de pages à ce problème.
S’y est ajouté, bien entendu, le handicap d’une « discrimination raciale » rampante qu’il a raison de souligner. Il était l’un des premiers à avoir dénoncé ouvertement ce qui est devenu aujourd’hui patent (12). Mais cela est loin de tout expliquer : comme d’autres chercheurs solides, comme beaucoup de jeunes Français à leur tour aujourd’hui, faute de trouver leur place en France, il fut recruté aux États-Unis. Paradoxalement, contrairement à ce que Didier Gondola a craint quand son maître d’alors le lui avait proposé, sa carrière en France aurait peut-être été plus aisée s’il avait suivi sa passion pour la révolution française (pp. 95-97). Il aurait pu, qui sait, bénéficier d’une certaine « discrimination positive » implicite, alors qu’en histoire africaine, spécialité très dénuée de postes, il se trouva « noyé dans la masse », une masse minime au demeurant. Mais il a raison : c’est en Histoire que l’université française est la plus fermée, puisque je crois bien qu’il n’existe toujours en tout et pour tout en France qu’un seul Africain titulaire d’un poste (4 historiens si l’on ajoute l’EHESS ; 5 si l’on compte le CNRS) : et encore, si, comme il le remarque lui-même, on attribue la qualité d’Africain à la couleur plutôt qu’à la nationalité ; au total un seul est en poste de responsabilité, et seulement parce qu’il est passé par la porte étroite de l’École normale supérieure et de l’agrégation d’histoire. Cette absence est paradoxale en histoire africaine, compte tenu de l’excellence des chercheurs d’origine africaine (l’expression adoptée dans les pays latino-américains est celle d’ « Afro-descendants« ) désormais « sur le marché », dans un contexte où les équivalences internationales de formation ont tendance à se substituer à la « porte étroite » d’antan. C’est une position indéfendable du point de vue américain : peut-on imaginer – ce qui est pourtant ordinaire en France, et pas seulement en histoire africaine – que l’on puisse enseigner et chercher sur l’histoire de quelque pays que ce soit sans faire se confronter quotidiennement le regard de l’extérieur et de l’intérieur, de spécialistes nationaux comme hexagonaux ?
J’appartiens donc, comme un certain nombre de mes collègues français, à une génération en passe d’être révolue, ou qui devrait l’être. Personnellement je trouve plutôt réconfortant de voir se réaliser ce pour quoi j’ai lutté et à quoi j’ai contribué autant que le permettaient les conditions politiques – on dirait aujourd’hui « idéologiques » – internes pas toujours favorables (celles de la « Françafrique ») (13) : la constitution (en Afrique, en France et hors de France) d’une (ou de plusieurs) écoles de pensée africaine aussi afrocentrées que possible (ce qui n’est pas synonyme d' »afrocentriste »). Certes, mon ego, ces dernières années, en a d’évidence été flatté (p. 199). Je trouve assez jolie et pas fausse, en tous les cas plausible, sa définition de mon itinéraire : « de la néo-marxiste à la conservatrice de gauche, de la pasionaria à la mandarine » (p. 177 note 3). Tout est question de point de vue ; car je ne crois pas qu’un historien comme Daniel Lefeuvre me voit en « conservatrice », même de gauche…
Une plus jeune collègue me confiait récemment : vous avez été les « rois de la brousse », nous avons dorénavant à montrer que, bien que Français, nous pouvons écrire de la bonne histoire africaine. C’est bien ce que suggère le jugement trop dur que porte Didier (je peux adhérer à la première phrase, mais quand même pas à la seconde !) : « L’africanisme français n’a pas produit de chercheurs comparables à Terence Ranger, Basil Davidson ou John Iliffe, dont il ne viendrait à l’idée d’aucun Africain de questionner ni la sincérité ni la passion à l’égard de l’Afrique  » (p. 178 note 8). Voilà qui est inutilement méchant…
Mais gare aux donneurs de leçon, surtout s’ils la connaissent aussi mal qu’un Sarkozy ou qu’un Guaino. Le chercheur français, qui n’est pas alerté comme aux États-Unis par la prégnance African American, devrait aussi avoir la conscience aiguë du fait que, pour les gens du Sud, ce qu’il dit ou écrit peut être malicieusement interprété. La présence plus soutenue d’Africains au sein des communautés françaises de chercheurs permettrait aussi de mettre constamment en garde et d’instruire sur ce point. Car cette susceptibilité, trop souvent oubliée ou tenue pour méprisable, s’explique par l’histoire, par le sentiment vif d’avoir été floué pendant des siècles, et de continuer à l’être. Que ce point de vue puisse paraître excessif, soit. Mais cela signifie qu’il faut être aux aguets sur la « bibliothèque coloniale » car, plus souvent qu’il n’est raisonnable, les plus attentionnés des chercheurs du nord commettent, à tout le moins, des fautes de goût. Dans son ouvrage, Didier Gondola en offre de multiples exemples. Je ne cesse comme lui, en Afrique ou en France, d’être frappée par l’inconscience de gens qui s’estiment connaisseurs de l’Afrique parce qu’ils y ont vécu ou exercé longtemps, mais qui commettent des impairs surprenants. Et que dire des autres ! le Président Sarkozy, avec son inqualifiable « discours de Dakar » de juillet 2007, vient d’en faire une démonstration caricaturale. Ce qui est plus grave, c’est que beaucoup de nos concitoyens ne sont même pas encore en état de le comprendre. Nos partenaires africains sont d’une infinie politesse, similaire à la courtoisie orientale : jamais on ne démentira ; dire non est une grossièreté ; exprimer son malaise devant une inconvenance est malvenu. Mais que d’impondérables non saisis par l’Occidental pressé, trop sûr de sa légitimité, porteur de la bonne parole ! Cette morgue est si intériorisée qu’elle en est inconsciente car héritée d’une histoire qui remonte aux débuts de la traite des noirs et de l’esclavage. Or elle suscite la colère et le mépris des interlocuteurs africains, en France comme ailleurs. Il faut rester tellement modeste devant ce qu’on ne saisit pas bien pour une foule de raisons, parmi lesquels l’héritage culturel de l’observateur demeure prégnant, c’est-à-dire le point de vue dans lequel le placent sa naissance et sa propre histoire.
En définitive, si les nouvelles générations africaines, avec l’impétuosité de leurs convictions, proclament haut et fort que les gens du nord ne servent plus à rien, c’est inexact, mais cela signifie surtout que l’histoire est une science sociale qui vit, qui évolue, et qu’un historien, ou une école historique a fait son temps. Notre rôle, en tant qu’historien et témoin, est de tenir compte de cet « air du temps », de l’analyser, de le comprendre, et de l’intégrer à nos propres pensées. N’est-ce pas le propre de l’histoire ?
Des chercheurs africains forcément militants
Ceci dit, il ne faut pas non plus faire d’anachronisme. Pour ceux qui ont connu la colonisation, d’un côté comme de l’autre, choisir d’étudier l’Afrique au temps de la décolonisation, c’était un combat. Écrire cette histoire au temps où justement la très grande majorité des historiens prétendaient sans rire que « l’Afrique n’avait pas d’histoire » (ce qu’hélas Sarkozy vient de reprendre à son compte) était un acte politique et militant. Pour un Français, écrire l’histoire de l’Afrique n’est pas neutre. Il n’en reste pas moins qu’elle n’apparaît plus aujourd’hui être pour le chercheur français une « urgence politique » comme elle le demeure pour les Africains. C’est d’ailleurs pourquoi l’africanisme occidental ne peut plus être qu’un appoint. En revanche, l’aspect militant est urgent et toujours vivace chez les chercheurs africains. Là gît sans doute une différence inconciliable, qui fait que nous ne sommes pas tout à fait sur la même planète.
Que reste-t-il aux militants du Nord désireux d’être utiles au Sud ? Au-delà d’une action attentive et exigeante sur des problèmes immédiats de portée à terme gravissime, comme la montée du racisme et de la xénophobie, et la fermeture de nos frontières à la plupart des gens du Sud, prolétaires comme intellectuels, que faire ? Comme le demande, et même l’exige Didier Gondola, il faut d’abord faire le ménage chez nous, en Occident. Expliquer inlassablement à nos compatriotes qu’ils ont la tête farcie de préjugés mortels que certains médias (même s’il y a quelques progrès) continuent de propager avec une pesanteur désespérante. La vieille Europe (et ses africanistes), au lieu de se draper dans la conviction multiséculaire du fardeau de l’homme blanc, devrait se méfier du siècle à venir. Les Occidentaux auront plus à y perdre que les Africains. Or, malgré les efforts des spécialistes, les clichés demeurent. Les gens du Nord sont-ils récupérables ? On peut en douter, alors que le regard de l’historien, qui a tendance à jongler avec les siècles, fait préconiser en Occident une lente agonie de fin d’empire. C’est sans doute, paradoxalement, la chance des sociétés du Sud, des peuples du Sud, d’avoir tant à lutter pour conquérir ce qui leur manque si cruellement : un niveau de vie décent, la santé, l’éducation, la liberté, du travail, la dignité. Le combat est dur, il est et le sera peut-être encore longtemps. Mais l’Afrique a sans doute un avenir plus prometteur que celui de la trop vieille Europe (14).
Pour un africaniste, spécimen en voie sinon de disparition, du moins de perdre ses prétentions, il est donc devenu incongru de continuer à vouloir se mettre, avec les maladresses inévitables du propos, « à la place » des Africains. Un « regard croisé » de partenariat est nécessaire. Mais ce regard croisé, nous enjoint Didier Gondola (chapitre 9), doit être à la fois paritaire et pluriel. Est-ce possible et, surtout, est-ce vraiment accepté par les savants du Nord ? Paulin Hountondji, éminent philosophe béninois, a raison de remarquer que le chercheur africain d’aujourd’hui, sur le plan national ou international, joue encore trop souvent un rôle similaire à celui de l’informateur analphabète de naguère : comme l’interprète avait pour fonction de renseigner l’enquêteur colonial, le chercheur africain, publié ou non, a pour rôle premier de servir la recherche africaniste ; même personnalisés, ses travaux, jusqu’à il y a peu dirigés et donc utilisés par un savant du nord, publiés par un éditeur du nord, continuent à enrichir les bibliothèques et le savoir du nord. (15)
L’inégalité des échanges scientifiques
Plus généralement, l’échange inégal existe dans le domaine scientifique comme dans la sphère économique. Il en sera ainsi tant que des centres de recherches autocentrés ne se développent pas prioritairement par et pour le sud. Faute de livres et de bibliothèques, les possibilités offertes par le réseau internet vont jouer un rôle-clé. D’où l’importance des réalisations panafricaines d’information et de recherche (comme le CODESRIA), et l’intérêt d’un projet comme celui de Paulin Hountondji à Cotonou, ou de Mamadou Diawara à Bamako, de fonder en Afrique et pour les Africains des Instituts de recherche aussi élitistes en leur genre que le Princeton Institute américain : les Africains sont en droit, comme les autres, de revendiquer l’excellence qui ne leur est reconnue par le Nord qu’à titre individuel. Ces projets sont riches de promesse, et complètent les bases déjà proposées par le CODESRIA.
La « bibliothèque coloniale » est en francophonie plus prégnante que dans le monde anglophone, aussi bien aux États-Unis qu’en Grande-Bretagne où le « pré carré » de l’ancien domaine impérial a moins sévi qu’en France, au moins en ce qui concerne l’Afrique. C’est ce que proclame le livre de Didier Gondola : chercheurs ou non, les Français ont à gérer un héritage lourd. Le savoir africaniste français – comme d’ailleurs tous les savoirs africanistes de l’époque – a été élaboré la main dans la main avec l’impérialisme colonial. L’ethnologie et l’ethnographie sont nées de et avec la colonisation – Claude Lévi-Strauss fut le premier à le reconnaître -, l’anthropologie correspond à la décolonisation, et l’histoire africaine, en l’occurrence fille des précédentes, est devenue possible avec les indépendances. Cette histoire, qui a fait feu de tout bois, s’est donc nourrie des productions coloniales antérieures. Celles-ci ont inventé des concepts qui empoisonnent encore la vie scientifique, faute d’avoir tous été revus et amendés, « déconstruits » (16). Les autres Européens, qui (sauf les Portugais) n’ont pas eu à défendre tardivement un empire, paraissent moins souffrir de préjugés dépassés : ainsi les universitaires allemands ou scandinaves non spécialistes se montrent souvent plus réceptifs aux réalités africaines d’aujourd’hui que la moyenne de leurs homologues britanniques, néerlandais, ou belges, eux-mêmes moins complexés que les Français quant à leur passé colonial…
Néanmoins, Didier Gondola a commencé son ouvrage après son départ de France et, depuis, la recherche a évolué. Les jeunes historiens de l’Afrique de langue française, qu’ils soient Français ou Africains, ont changé : nés après les indépendances, la plupart sont délivrés des vieux démons ; le respect et la tolérance réciproques s’instaurent sur un pied d’égalité, les jeunes non seulement échangent leur savoir mais sont aussi attentifs à la sensibilité de l’autre. Cet élan se poursuivra mieux si ceux qui les forment s’adaptent à leur tour, ce qui est malheureusement loin d’être toujours le cas. J’en donnerai un exemple récent : le colloque Le contact colonial des Individus et des Groupes, organisé par le collectif « France Outre-Mers » rassemblant un ensemble d’universités prestigieuses, de Paris-1 à Paris-8 (à l’exception de Paris-7), EHESS incluse de même que l’Université de Provence et quelques autres (9 et 10 novembre 2007). Le point fort fut le nombre élevé d’étudiants en recherche sur le thème. Mais le point faible pour ne pas dire inquiétant est le choix des sujets en cours, concernant à peu près exclusivement l’histoire politique coloniale et les élites locales. Or les « groupes en contact » auraient dû impliquer d’autres interlocuteurs, autrement plus nombreux, dont le rôle de passeur a été au moins aussi grand : à savoir l’ensemble des salariés colonisés, ces fameux « auxiliaires de la colonisation » (porteurs, postiers, cheminots, moniteurs, commis de toutes sortes…), et aussi des travailleurs informels toujours plus nombreux en ville, en contact de travail quotidien avec les colons. Ce sont aussi ceux, ou leurs enfants, qui, surtout depuis la Seconde Guerre mondiale, sont arrivés en France en masse, déjà fort experts en « contacts » qu’il faudrait étudier : sur la masse considérable et le rôle de médiateurs de tous ces « gens d’en bas », en deux jours et une cinquantaine de communications on n’a guère entendu plus de trois mots… Il faudrait enfin comprendre dans l’université française qu’il est vain de faire de l’histoire de la colonisation sans les colonisés.
Des passerelles de savoir à établir
Tout n’est pas à cette image, qui scinde malencontreusement les champs de l’histoire en deux sections qui s’ignorent : Histoire de la colonisation versus Histoire de l’Afrique. Or les historiens de l’Afrique, originaires du Nord ou du Sud, sont aujourd’hui des historiens tout court ; le comparatisme devient un tel réflexe que nombreux sont aussi les thèmes à la plume interchangeable, quels que soient le contexte, la couleur, le continent. Ce sera chose faite quand les historiens africains s’attaqueront à leur tour à l’histoire de l’Occident, comme Didier n’osa pas le faire il y a vingt-cinq ans. En attendant, il est urgent que les « africanistes » français, c’est-à-dire les chercheurs qui privilégient le champ de recherche africain, comblent aussi de leur côté le fossé qui les sépare des historiens de la colonisation qui, eux, privilégient l’histoire de la métropole coloniale : il faut cesser de s’accrocher au combat qui, dans les années 1960, consistait à faire reconnaître l’existence même de l’histoire africaine. Aujourd’hui, il n’est plus raisonnable d’arguer que s’intéresser à l’histoire de la colonisation détournerait les chercheurs de l’analyse du terrain africain stricto sensu. Les deux se tiennent. Le drame français actuel de la méconnaissance de l’Afrique tient précisément à ce que l’on continue de croire que l’on peut, de France, traiter de la colonisation française sans les Africains, ou a contrario penser l’Afrique francophone à l’époque coloniale sans la France. Établir des passerelles de savoir s’impose. Puisque les tenants de l’histoire coloniale n’en ressentent pas l’urgence, c’est aux « africanistes » de s’y atteler. De ce point de vue, Sophie Dulucq, aujourd’hui professeure à l’Université Toulouse-Le Mirail, a raison qui, ayant consacré ses recherches à l’histoire ouest-africaine sous la colonisation, a déclaré lors de sa soutenance d’HDR, à la déception de la plupart des « africanistes » membres de son jury, qu’elle entendait désormais se tourner vers le volet français de cette histoire (Université Paris-7, 2005) (17) : c’est en pratiquant la confrontation des points de vue que l’on peut le mieux appréhender la complexité des processus sociaux qui se sont enclenchés de part et d’autre durant cette période. C’est aussi par ce biais que nous pouvons expliquer au public français à quel point il se méprend sur les réalités africaines. C’est donc, en quelque sorte, le nouveau devoir des « africanistes », relayés en grande partie sur leur terrain de prédilection par les chercheurs africains eux-mêmes.
Le temps révolu du paternalisme scientifique
Enfin, l’anglais est devenu aujourd’hui langue scientifique internationale, en sciences humaines comme en sciences dures. Les Africains francophones l’ont compris plus vite que beaucoup d’africanistes français. Ils deviennent bilingues d’autant plus vite que la francophonie, bafouée par la réduction drastique des crédits et les lois restrictives sur l’immigration, est devenue un leurre. C’est aussi pourquoi, parce que leur culture est plus ample – du moins pour ceux qui ont la chance de circuler en dehors du continent – ces intellectuels africains francophones sont des historiens d’une qualité parfois supérieure à celle de Français moins curieux. Pour deux raisons : d’une part (le chapitre 8 consacré par Didier à cette question des « comparaisons utiles » est éclairant) parce que l’ouverture sans complexe sur le monde scientifique anglophone leur offre à la fois plus de savoir et plus de moyens ; et d’autre part parce que nous autres Français, comme d’ailleurs tous les peuples au passé colonial, gardons un réflexe conservateur, celui de penser que notre érudition est la meilleure du monde. Or, globalement, ce n’est plus vrai, ni des bibliothèques françaises, ni des connaissances, parce que celles-ci sont trop souvent imbues d’un préjugé tenace de supériorité qui résiste de moins en moins à la confrontation des réalités sur le terrain. Le temps est révolu du paternalisme scientifique.
La mondialisation du savoir a au moins ceci de bon : les historiens africains y participent comme les autres. Un des acquis spécifiques des sciences sociales africaines est leur caractère d’emblée international. Compte tenu du nombre très minoritaire des « africanistes » français, la recherche française ne sera vraiment à la pointe que si, à côté des chercheurs français, elle sait rassembler des chercheurs étrangers venus de tous les horizons : Américains et autres Européens, certes, mais surtout, de plus en plus, Africains d’Afrique et Africains de la diaspora intellectuelle – dont beaucoup d’entre eux francophones – en poste aux États-Unis et en Europe, venus de Bayreuth, de Hambourg, de Lausanne, de Leyden ou d’Uppsala, pour ne parler que de quelques-uns des principaux centres d’accueil. Certes, cela se fait déjà à l’occasion de colloques, de tables rondes ou de réseau. Mais cela reste insuffisamment intégré. La colère de Didier Gondola nous l’enjoint : il est temps que les « africanistes » de France apprennent à mieux entendre « la voix des autres », plutôt que d’observer un repli mental frileux visant à protéger d’obsolètes prérogatives occidentales, nationales ou même, de façon plus limitative encore, localement institutionnelles. Des controverses d’emblée plus amples imposent sinon un langage commun, du moins une volonté incessante de compréhension et de respect de l’autre. En sus, les coupures ne sont pas nécessairement d’ordre géographique ou culturel ; elles peuvent aussi, de façon transversale, exprimer des ruptures de générations et, bien entendu, regrouper ou opposer des familles intellectuelles et politiques.
L’ouvrage décapant de Didier Gondola impose sans indulgence le constat suivant : les chercheurs français sur l’Afrique sont devenus si minoritaires qu’il n’est plus question d’observer un splendide isolement – ce que les chercheurs en sciences dures savent depuis longtemps -. Ce n’est pas faire entreprise de dénigrement du savoir occidental que de préférer, face à la notion déjà devenue réductrice de « regard croisé », souligner l' »enchevêtrement des référents identitaires » : à l’historien, de quelque bord qu’il soit, de savoir rendre compte de cette « pluralité des répertoires » et des « loyautés multiples » ainsi impliquées. Car les « africanistes » de France n’ont plus leur objet d’étude : l’Afrique. Les spécialistes de l’Afrique, de quelque bord qu’ils soient, ont tous le même sujet d’étude : les Africains, eux-mêmes ou les autres. La confrontation demeure nécessaire et féconde.
Mais comme il faut lutter pour faire entendre ses idées, tandis que la « vieille garde » empreinte de nostalgie coloniale tient encore globalement le haut du pavé institutionnel ! Le drame est que peu de choses semblent avoir changé depuis que Didier écrivait son libelle ; l’université apparaît bien en phase de repli frileux sur son quant à soi. Quelques outsiders sont apparus, comme les éditeurs du groupe ACHAC, qui savent lancer des concepts et des réflexions nouveaux, sur le postcolonial – encore loup-garou en France pour beaucoup – ou des thèmes pourtant apparemment évidents comme la « culture coloniale » à la française ou la « fracture postcoloniale » dont souffre la dite société. Mais ces historiens imaginatifs restent globalement condamnés par l’establishment même de gauche. C’est leur faire trop crédit que d’alléguer que ce sont eux qui auraient « créé » le post-colonial ou la fracture en les « disant ». Il faut s’interroger sur le pourquoi de cette effervescence avec laquelle on peut certes exprimer des désaccords, mais à condition de comprendre le phénomène pour ce qu’il traduit, et ne pas se tromper d’adversaire. Car, compte tenu de la situation française actuelle, on ne peut qu’agréer au constat de Didier : globalement, les africanistes français ont failli, le fait est là puisqu’en un demi-siècle nous n’avons même pas réussi à faire connaître aux Français la richesse de l’histoire africaine. « Comment pourrions-nous, dans ces conditions, éluder la question de notre propre responsabilité ? (18) » On pourra toujours arguer des mêmes arguments : la cécité des politiques, le manque de moyens, la lourdeur des préjugés hérités de l’histoire, l’accablement des charges universitaires, la médiatisation des autres plutôt que de soi…, bref tout sauf nous-mêmes. Je ne résiste pas à reprendre cette exclamation de Gérard Noiriel, tant sa stupéfaction fait écho à la mienne.
Je ne peux néanmoins m’empêcher d’exprimer une note moins radicale. De l’eau a coulé sous les ponts depuis que Didier a commencé, en 1998, d’écrire son livre, même s’il fut souvent retouché depuis. Toute « mandarine » que je sois devenue à ses dires, je revendique un zeste de « pasionaria », l’optimisme chevillé au corps : le renouveau intellectuel de jeunes (et moins jeunes) chercheurs français n’est encore que partiel, mais face à la vague montante de conservatisme passéiste aujourd’hui politiquement dominant, il est énergique. De grandes thèses sont récemment parues ou s’annoncent, qui vont combler les vides par lesquels s’engouffrent les « nostalgiques » du « bon temps colonial » (pour reprendre le titre ancien d’une thèse remarquable d’Alain Tirefort). En dépit du « splendide isolement » de l’africanisme français, le dynamisme de jeunes entrepreneurs comme les membres de l’ACHAC, même si on peut discuter la méthode parfois légère de certains d’entre eux, a réussi à franchir le barrage des grands medias, et commencé à ébranler l’opinion. Cela n’avait guère eu lieu depuis La Question d’Henri Alleg… reprise en 2000 par la thèse médiatisée de Raphaëlle Branche sur la torture en Algérie (mais on reste pusillanime en histoire subsaharienne). Il est néanmoins remarquable de noter, à travers le dépouillement systématique de l’hebdomadaire Télérama qui en fait l’inventaire attentif, le nombre élevé, même si globalement il reste noyé dans la masse, de reportages de qualité qui passent sur plusieurs chaînes télévisées sur des « sujets qui font mal » de l’histoire africaine et de l’histoire coloniale. On aurait aimé que l’ouvrage s’achève sur cette note d’espoir : l’invective risque d’entraver le dialogue auquel, entre chercheurs au moins, on ne doit jamais renoncer.

1. Cf. Jean-Loup Amselle, Branchements : anthropologie de l’universalité des cultures, Paris : Flammarion, 2001, p. 108.
2. Gérard Noiriel se référant à Albert Memmi, Racisme : la responsabilité des élites, Paris, Textuel, 2007, p. 32.
3. Ibid., p. 66.
4. Ibid., p. 67.
5. Ibid., p. 72.
6. Ibid., p. 69.
7. Ibid., p. 66-67.
8. « De l' »africanisme » vu de France. Le point de vue d’une historienne », Le Débat, no 118, 2002, pp. 34-48.
9. Edward W. Said, Orientalism, 1978, traduit L’Orientalisme : l’Orient créé par l’Occident, Paris, Seuil, 1980.
10. Valentin Mudimbe, The Invention of Africa, Bloomington, Indiana University Press, 1988 ; The Idea of Africa, 1994.
11. Herman Lebovics, La « vraie France ». Les enjeux de l’identité culturelle, 1900-1945, Paris, Belin, 1995 (trad. de l’américain, 1992).
12. Dider Gondola, « La crise de la formation en histoire africaine en France, vue par les étudiants africains », Politique africaine, n° 65, mars 1997, pp. 132-139. Cet article, alors accueilli par un tonnerre de critiques (qui ont contribué faire monter d’un cran la colère de son auteur), notamment dans le numéro suivant de la même revue, est, paradoxe d’une évolution de la pensée, cité aujourd’hui comme fondateur d’un courant significatif : cf. Romain Bertrand, Mémoires d’empire. La controverse autour du « fait colonial ». Broissieux, Éditions du Croquant, 2006.
13. Voir, sur le contexte et les aléas de la « coopération scientifique » dans le cadre de la FrançAfrique des années 1960-2000, mon article « French Historiography on Africa : a historical and personal contextualisation », Afrika Spectrum, vol. 41, no 1, 2006, pp. 107-126.
14. Voir à ce propos le petit livre convaincant publié sous la direction de M. Chemillier-Gendreau, Peut-on être vivant en Afrique ? PUF, coll. Forum Diderot, 2000.
15. Paulin J. Hountondji, Combats pour le sens. Un itinéraire africain, Cotonou, Les Editions du Flamboyant, 1997, p. 167.
16. Cf. mes articles : « L’anthropologie, ou la mort du phénix ? », Le Débat, n° 90, 1996, pp. 114-128, & « L’afro-pessimisme au seuil du troisième millénaire », Burkina-Faso. Cent ans d’histoire, 1895-1995, Paris, Kathala-PUO, 1999, pp. 327-338.
17. Elle s’inscrit ce faisant en contrepoint de l’historien Jean-Pierre Chrétien ou du sociologue Jean Copans qui estimaient au contraire, encore récemment, qu’investir la réalité coloniale française serait désinvestir sur l’Afrique. Cf « Autour d’un livre. La Fracture coloniale. La société française au prisme de l’héritage colonial » (Pascal Blanchard, Nicolas Bancel et Sandrine Lemaire eds), discuté par Jean-Pierre Chrétien, Catherine Coquery-Vidrovitch et Jean Copans, Politique africaine, n° 102, juin 2006, pp. 189-202. Jean-Pierre Chrétien annonce néanmoins un article sur le thème : « Le discours de Dakar. Le poids idéologique d’un « africanisme » traditionnel », Esprit, novembre 2007. À n’en pas douter, il y expliquera judicieusement qu’il n’y a pas qu’un seul « africanisme » en France, même si Didier a tendance à « tout mettre dans le même panier », les « Anciens » comme les « Modernes ».
18. Op. cit., p.69.
Didier Gondola, Africanisme : la crise d’une illusion, Paris, L’Harmattan, 2007, 250 p.///Article N° : 7089

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