Yao Bobby délivre son rap du Togo à Paris

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Issu de la scène rap togolaise, Yao Bobby sort son premier jet d’encre : Histoire d’un continent, un opus politique et panafricain.

Pas besoin de faire un dessin pour deviner ce qu’il y a derrière le titre du premier disque de Yao Bobby, Histoire d’un continent : une ode vibrante aux cultures et à l’unité africaines. « À travers l’Histoire, je veux souligner que ce continent ne regroupe pas seulement plusieurs pays, explique Yao. Il foisonne de plusieurs langues, plusieurs religions. » Militant, Yao raconte notamment dans le morceau Réfugié un épisode tragique de l’histoire de son pays survenu en 1992. « À 17 ans, j’ai dû me réfugier au Ghana voisin parce que les militaires tiraient sur les jeunes. Ils jetaient les corps dans la lagune de Lomé. » Un autre titre, le bien nommé Révolution, bouillonne de soif de justice et interpelle.

Un son live
Pour polir son discours, déjà bien affûté, le rappeur togolais a parsemé, avec parcimonie, des featurings dans son album. « Chaque artiste a apporté une particularité, une couleur. On sent vraiment que c’est l’Afrique. » Slam avec Neggus, rap avec Edgar Sekloka, du groupe Milk Coffee Sugar, voix avec les Congolais Freddy Massamba – qu’il a connu à Dakar chez Didier Awadi – et Hanna M qu’il a d’abord admirée sur les scènes parisiennes avant de l’inviter en studio. Côté arrangements, le rappeur a privilégié un son live avec l’apport du joueur de kora, Noumoucounda, mais aussi des touches de guitares et des percussions.

« Démocratie cachée »
Yao Bobby n’est pas un novice de la scène hip hop. Issu du collectif de rappeurs togolais Djanta Kan (la canne du lion en éwé), il se lance dans l’écriture dès 1992 et assure la première partie d’un certain… MC Solaar, à Lomé. Avec ses acolytes du Djanta Kan Daflag, Amete K et Amagaflo, il symbolise l’esprit frondeur d’une jeunesse à l’abandon, celle du quartier Kodjoviakopé, alias Cité K, situé à la frontière avec le Ghana. « À la Cité K, les enfants traînent, la drogue tourne. Je me suis dis, je ne vais pas être dans la rue à faire n’importe quoi. J’ai pris le hip hop comme mon âme. »
De façon plus ou moins détournée, les Djanta Kan taclent le pouvoir dans leurs textes. « On a toujours connu la famille Gnassingbé. Ce n’est pas vraiment une démocratie. J’appelle ça la démocratie cachée, dénonce Yao. Aujourd’hui, j’ai honte de dire que telle personne est morte du tétanos. Elle est morte parce qu’il n’y avait pas de moyens pour acheter des médicaments ! »

Tourné vers l’avenir
En 2005, à la mort du président Gnassingbé Eyadema, le climat au Togo est tendu. Yao reçoit un appel : « Il faut sortir du pays car vous êtes visés. » Les militaires ne tardent pas à débarquer au domicile des trouble-fêtes en demandant : « Où sont les jeunes qui parlent de politique tout le temps ? » Après un passage au Gabon, Yao atterrit à Paris où il s’installe. La suite on la connaît : cet album solo, édité par Radio France Internationale. Aujourd’hui plus que jamais, Yao se tourne résolument vers l’avenir de son continent. Avec sa structure, Arts 2 rue, il anime des ateliers pour les enfants : « C’est un moment de partage. Avant d’aller dormir, nos parents nous disaient des contes. Mais ça n’existe plus. On s’est dit que par le rap on peut aussi communiquer avec les jeunes. Leur montrer que l’avenir de l’Afrique c’est nous, c’est eux, c’est tout le monde ! »

En savoir plus :

www.yaobobby.com

Entretien à retrouver en intégralité sur le site africultures.com///Article N° : 12656

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